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Les nouvelles esclaves


Par Rachid Boufous

À Errachidia, Aziz Akhannouch est venu distribuer des mots. Des mots vides, des mots creux, des mots qui s’évaporent dès qu’ils franchissent ses lèvres. Il a parlé « d’initiative personnelle » comme un médecin ivre qui prescrit de la camomille à un cancéreux.

Il a promis l’effort individuel à une région qui agonise. Il a souri, il a salué, il est reparti. Rien derrière lui. Rien devant eux.



Pas un seul projet. Pas un investissement important. Pas d’infrastructures nouvelles, pas d’autoroutes, pas de chemin de fer, pas d’usines, pas de plans d’urgence. Rien. Le vide. Le désert.

L’incurie devenue méthode de gouvernement… Et pendant que le chef du gouvernement joue à l’illusionniste dans une région où tout le monde connaît la réalité, une autre vérité s’affiche sur des murs administratifs : des horaires d’inscription pour envoyer les femmes de la région ramasser des fraises en Espagne.

Voilà l’unique politique publique concrète qui reste : exporter les mères, louer les femmes, monnayer la détresse. On parle de mobilité saisonnière. En réalité, c’est un marché d’esclaves moderne, réglementé par formulaire et cachet humide.

Car qu’est-ce que ce programme, sinon l’organisation méthodique d’un désastre social ? On prend les femmes les plus pauvres, on leur demande d’être mères, pour les tenir par le chantage affectif, on les entasse dans des bus, puis dans des serres, puis dans des dortoirs, et on appelle cela une opportunité.

Une opportunité de quoi ? D’endurer ? De courber l’échine ? De survivre un trimestre avant de replonger dans la même misère ? Pendant qu’à Rabat on parle d’égalité des chances, à Huelva on compte les cagettes ramassées à 60€ la dure journée de labeur.

Ce gouvernement n’a pas seulement abandonné Errachidia : il l’a livrée, offerte, sacrifiée au plus offrant. Il a jeté l’éponge. Il a déserté la bataille contre la pauvreté. Il a renoncé à sa mission fondamentale : protéger les siens.

Le Maroc officiel, celui qui parade devant les caméras, parle de vision, de réformes, de stratégie.

Les nouvelles esclaves
Le Maroc réel, celui des villages oubliés du Sud-Est, parle de visas temporaires, de dettes, de faim. L’un fabrique des discours ; l’autre fabrique des départs. À Errachidia, on ne rêve plus d’avenir. On rêve d’un contrat de trois mois pour aller ramasser des fruits et économiser durement les .

Et quand un pays ne propose plus à ses femmes que de devenir ouvrières agricoles à l’étranger, c’est que le pays a touché le fond, mais qu’il ne l’a pas encore admis. Akhannouch, lui, continue de sourire.

Il parle « d’initiative personnelle ». Bien sûr. Dans une région qui manque de tout, l’initiative personnelle est devenue le dernier refuge de l’État qui ne sait plus quoi dire ni quoi faire.

C’est tellement pratique : quand le gouvernement n’a aucune vision, il accuse les citoyens d’en manquer une. Quand le gouvernement ne crée rien, il exige que les pauvres inventent leur propre salut.

Quand le gouvernement échoue, il renvoie la faute à « l’individu »… Et c’est ainsi que la boucle se referme : les femmes de Goulmima, Tadighoust, Tinjdad, Mellaab et des environs, deviennent les petites mains invisibles des serres espagnoles, pendant que les responsables marocains assistent à des colloques sur « l’autonomisation économique des femmes ».

Ce pays marche sur la tête.

Il célèbre la femme marocaine, de préférence urbaine, dans les discours, mais il exporte la femme rurale pauvre et démunie, dans les faits…. Les nouveaux esclaves ne sont pas des silhouettes enchaînées dans un port lointain.

Ce sont des mères qui quittent leurs enfants pour un salaire journalier fumant à 60 euros, dont la moitié sera engloutie par les charges, par les dettes, par la survie. Ce sont des femmes sélectionnées pour leur docilité.

Elles ne créeront pas de problèmes aux planteurs espagnols, car elle ne cherchent que la survie de leurs familles. Ce sont des victimes d’un système qui ne leur laisse aucune échappatoire. Mais la honte ne tombe pas sur elles.

Elle tombe sur le gouvernement actuel, qui, incapable de créer des emplois dignes, a fait de l’exil féminin un programme économique.

La honte tombe sur ceux qui, au lieu de construire des usines à Errachidia, permettent à d’autres de construire des serres à Huelva. La honte tombe sur ceux qui, au lieu d’ouvrir des horizons, ouvrent des registres d’inscription pour des départs massifs.

La honte tombe sur ce gouvernement qui, chaque jour, prouve que son silence, son inaction, son absence d’initiatives économiques, sont devenus des politiques publiques.

Et pendant que les femmes s’en vont, que restera-t-il de la région du Tafilalet, berceau de la dynastie Alaouite  ?

Des discours. Des ruines. Des statistiques mensongères. Et un chef du gouvernement qui reviendra peut-être un jour pour dire, encore et encore, que « tout dépend de l’initiative personnelle ».

Mais que vaut l’initiative personnelle d’un peuple abandonné ? Que vaut-elle face à un État absent, à un gouvernement étranger aux réalités, à une élite qui ne descend jamais de son piédestal ?

La vérité est simple, brutale, impossible à édulcorer : Le Maroc ne développe pas Errachidia. Il l’exporte. Femme après femme. Saison après saison.

Et tant que ce gouvernement restera en place, les nouvelles esclaves auront toujours du travail… Que Dieu Maudisse la Pauvreté et la Misère !

PAR RACHID BOUFOUS/FACEBOOK.COM



Lundi 8 Décembre 2025


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