Il y a des saisons qui forcent le respect. Et puis il y a celle d’Achraf Hakimi, qui oblige presque à se lever de son siège.
Buteur en quarts, en demies et en finale de Ligue des champions, record de contributions offensives pour un défenseur, figure clé du triplé historique du PSG… Sur le papier, difficile d’imaginer un meilleur candidat au Ballon d’Or. Mais sur le terrain, politique, c’est une autre histoire.

Il y a des rêves qui se murmurent dans un coin de vestiaire et d’autres qui se clament face caméra. Hakimi a choisi la deuxième option. Dans une interview à Canal+, il a affirmé qu’il méritait le trophée. Pas un cri d’ego, juste un constat : 11 buts, 15 passes décisives, décisifs dans tous les matches clés et un record historique pour un latéral. Sauf que dans le PSG version 2025, certains rêves sont plus “corporate” que d’autres.

Car Paris n’avait pas prévu ce scénario. Le plan était clair : faire campagne pour Ousmane Dembélé, profil offensif, favori français pour un trophée remis… à Paris, par une organisation française. Dans ce jeu de lobbying, Hakimi partait déjà avec un handicap, avant même que le club ne soit soupçonné d’avoir tenté (en vain) de couper son passage sur le sujet.

Officiellement, aucune censure. Officieusement, difficile d’ignorer le calendrier chargé en opérations médiatiques autour de Dembélé. Depuis Luis Enrique, la ligne est claire : priorité au collectif, pas d’ambition personnelle affichée. Voir Hakimi revendiquer publiquement le Ballon d’Or a surpris en interne. Pas au point de créer un conflit, mais assez pour réveiller un vieux problème : que se passe-t-il quand un club a trop de candidats pour un seul trophée ?

Neuf Parisiens figurent parmi les 30 nommés, égalant un record du Real Madrid. Une richesse qui peut vite devenir un piège. Si les votes se dispersent entre Dembélé, Hakimi ou Vitinha, la gloire peut échapper à tous. La France post-Mondial 2018 ou le Real 2024 en savent quelque chose. Et à l’ombre, un Lamine Yamal attend, prêt à profiter de la moindre division.

Dans ce genre de contexte, le terrain ne suffit plus. Le Ballon d’Or, c’est aussi un concours d’influence où les titres se jouent dans les bureaux, les couloirs et les dîners mondains. Paris le sait, et c’est pour ça que la communication est verrouillée. Mettre trop de projecteurs sur Hakimi, c’est risquer d’éclipser Dembélé. Et éclipser Dembélé, c’est potentiellement laisser passer le trophée à un rival extérieur. Alors, on module, on calibre, on choisit. Au risque de frustrer ceux qui, comme Hakimi, estiment que leurs chiffres devraient suffire à parler pour eux.

Hakimi, lui, assume. Aucun latéral droit n’a jamais soulevé ce trophée, mais ses chiffres parlent pour lui. Dans un football obsédé par les buteurs, il est l’exception qui dérange : un défenseur qui rivalise avec les standards offensifs des attaquants. Le genre que le Ballon d’Or récompense rarement, mais que l’histoire pourrait finir par saluer.

Reste ce parfum de paradoxe : un club qui prône l’unité, mais privilégie un visage. Un joueur célébré pour sa combativité, mais que l’on préférerait discret. Et une vérité que Hakimi a sûrement déjà comprise : au PSG, l’or ne se gagne pas seulement sur le terrain… mais aussi dans les couloirs.