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Réforme du secteur de l’énergie : vers une nouvelle gouvernance mixte ?


le Mercredi 16 Juillet 2025



Entre libéralisation, souveraineté et transition verte, le Maroc doit repenser en profondeur la gouvernance de son secteur énergétique. Et les entreprises publiques sont au cœur de ce défi.
Le secteur de l’énergie est sans doute l’un des plus stratégiques pour le Maroc. Il concentre des enjeux de souveraineté nationale, d’inclusion territoriale, de développement industriel, mais aussi de transition écologique et d’ouverture aux marchés. Pendant longtemps, l’État en a gardé le monopole, via des établissements publics comme l’ONEE ou des participations stratégiques dans les hydrocarbures, le renouvelable ou la distribution.

Mais les dynamiques mondiales, les engagements climatiques, les besoins d’investissement colossaux et l’urgence de la transition ont imposé une accélération : le Maroc engage une profonde réforme de son secteur énergétique, en s’orientant vers une gouvernance mixte, hybride, à la croisée du public et du privé.

​Une transition énergétique à piloter autrement

Avec la montée en puissance des énergies renouvelables telles que le solaire, l’éolien et l’hydraulique, ainsi que le développement ambitieux de projets de production d’hydrogène vert, le Maroc opère un basculement de paradigme vers un nouveau modèle énergétique. Ce changement exige non seulement des capacités d’investissement conséquentes et une agilité technologique accrue, mais aussi une gouvernance plus ouverte et plus performante pour accompagner cette transition stratégique.

Or, le système actuel, basé sur une gouvernance centralisée autour de l’ONEE et de quelques agences, montre ses limites : lenteurs décisionnelles, flou sur les responsabilités, manque de transparence sur les prix et les subventions croisées.

​La gouvernance mixte : vers un nouveau pacte

Le concept de gouvernance mixte incarne un modèle novateur où l’État, tout en conservant son rôle de stratège et de régulateur, partage le pilotage opérationnel avec le secteur privé, les collectivités territoriales et les citoyens. Ce modèle repose sur des partenariats public-privé pour la production et la distribution, l’intégration de capitaux privés dans des projets structurants tels que les parcs solaires ou les interconnexions, l’ouverture de certaines entreprises à la Bourse ou à des fonds souverains, ainsi que l’établissement d’autorités de régulation indépendantes. 

Ce modèle implique également une refonte de la gouvernance des entreprises publiques du secteur, afin de garantir une autonomie opérationnelle, une reddition de comptes régulière, une transparence accrue sur les investissements et les tarifs, ainsi qu’une parfaite cohérence avec les objectifs climatiques ambitieux du Royaume.

​L’ONEE et Masen : entre héritage et transformation

Deux entités sont au cœur de cette évolution : l’Office National de l’Électricité et de l’Eau potable (ONEE) et l’Agence Masen.

L’ONEE, structure historique, a entamé une modernisation de ses instances et une ouverture à des partenaires privés dans la distribution, notamment à travers des délégations de service ou des filiales spécialisées.

Masen, quant à elle, porte l’ambition renouvelable du pays, avec des projets phares comme Noor Ouarzazate, mais aussi des montages complexes mêlant dette, PPP et appels d’offres internationaux.

Mais ces deux entités doivent désormais s’inscrire dans une gouvernance nationale unifiée, en lien avec la réforme du secteur énergétique portée par le gouvernement et encadrée par l’ANGSPE pour les aspects de performance, de rentabilité et de cohérence stratégique.

Des enjeux majeurs pour l’ANGSPE

La réforme de la gouvernance énergétique confère à l’ANGSPE un rôle central et stratégique. Chargée de piloter les restructurations des actifs publics, d’évaluer la pertinence des partenariats et de définir une doctrine d’actionnaire adaptée à un secteur à fort risque, l’agence doit également veiller à ce que la logique de service public ne soit pas compromise par la quête de rentabilité.

Par ailleurs, elle porte la responsabilité d’assurer une transition énergétique inclusive, en intégrant les dimensions territoriales, telles que la ruralité et les zones de désert énergétique, les enjeux sociaux, notamment une tarification équitable, ainsi que les impératifs environnementaux, tels que la réduction de l’empreinte carbone et la gestion durable des ressources hydriques.

Une opportunité de leadership régional

En s’appuyant sur une gouvernance mixte efficace, le Maroc dispose des atouts pour s’imposer comme un modèle régional de transition énergétique structurée. Il bénéficie d’un portefeuille public robuste et expérimenté, d’une légitimité politique stable, de projets pilotes déjà opérationnels et d’une capacité avérée à attirer des investisseurs internationaux.

Toutefois, cette ambition ne pourra se réaliser pleinement que si la réforme engage sa logique jusqu’au bout, en assurant la dépolitisation de la gestion, la transparence des données, une ouverture raisonnée du capital et une cohérence stratégique affirmée.

U​n test pour l’État stratège

La réforme du secteur de l’énergie sera le test grandeur nature de la capacité du Maroc à piloter une gouvernance publique innovante, ouverte et performante. Elle mettra à l’épreuve l’ANGSPE, mais aussi la volonté politique de rompre avec les anciennes logiques d’opacité, de rente et de centralisme.

Si elle est réussie, la gouvernance mixte de l’énergie pourra devenir un levier de souveraineté intelligente, au service des territoires, du climat et de la compétitivité industrielle. Dans le cas contraire, le pays risquera de se heurter à un mur d’inefficience, au moment même où les besoins énergétiques explosent.

​Médias publics, quel avenir ? Une restructuration annoncée dans l’audiovisuel

À l’heure du numérique, de la fragmentation des audiences et de la concurrence privée mondialisée, les médias publics marocains s’apprêtent à vivre une profonde mutation. L’État actionnaire ne veut plus financer sans exiger.

La télévision publique marocaine a longtemps été considérée comme un outil d’information, de culture et de cohésion nationale. Mais à l’ère du streaming, des réseaux sociaux et de l’hyperpersonnalisation des contenus, les médias audiovisuels publics doivent impérativement se réinventer, ou risquer de devenir de simples vestiges du passé.

La restructuration du pôle audiovisuel public, annoncée par les autorités et suivie de près par l’ANGSPE dans sa fonction d’État actionnaire, marque une nouvelle étape dans la recomposition du paysage médiatique national. Objectif : repenser le rôle, le financement et la gouvernance des entités publiques de l’audiovisuel pour les aligner avec les attentes d’une société en pleine mutation.

​Une crise d’identité et de performance

SNRT, 2M, Soread… Ces institutions, profondément ancrées dans la mémoire collective marocaine, font aujourd’hui face à un triple déficit structurel. Le déficit d’audience se manifeste par une érosion continue au profit des chaînes étrangères et des plateformes de streaming.

Par ailleurs, malgré les subventions publiques et la redevance audiovisuelle, le déficit de financement persiste, limitant leurs capacités d’innovation et d’investissement. Enfin, un déficit de mission s’installe dans un contexte où les frontières entre divertissement, information et propagande deviennent floues, brouillant leur rôle de service public.

Plusieurs rapports officiels convergent sur ce constat : les médias publics marocains peinent à remplir efficacement leur mandat, tandis que leur gouvernance demeure enfermée dans un modèle administratif centralisé, rigide et peu adapté aux enjeux contemporains.

Une réforme structurelle en gestation

Face à ce constat, le gouvernement a engagé un vaste chantier de réforme du pôle public audiovisuel, structuré autour de plusieurs axes stratégiques. Il s’agit d’envisager un regroupement institutionnel des entités, via une fusion SNRT–2M ou la création d’une holding audiovisuelle, tout en adoptant une nouvelle charte des missions de service public, plus claire et mieux ciblée.

La réforme explore également de nouveaux modèles de financement, mêlant publicité régulée, mécénat culturel et développement de plateformes numériques, tout en repensant la gouvernance autour de conseils d’administration, d’une indépendance éditoriale renforcée et d’indicateurs de performance mesurables.

Ce processus s’inscrit dans le cadre plus large de la politique actionnariale pilotée par l’ANGSPE, qui entend appliquer aux médias publics les mêmes exigences qu’aux autres entreprises publiques : efficience, transparence et redevabilité.

Quel rôle pour l’État dans les médias ?

La grande question est celle du positionnement : doit-on considérer les médias publics comme un service culturel, un outil stratégique d’influence ou une entreprise comme une autre ?

Trois approches cohabitent et se confrontent. L’approche identitaire met en avant leur rôle dans la préservation de la langue, des valeurs nationales et de la diversité culturelle. L’approche économique privilégie la rentabilisation des actifs tels que les fréquences, les archives et les studios et la capacité à générer des revenus commerciaux.

Enfin, l’approche civique insiste sur l’indépendance éditoriale, la pluralité des opinions et l’ancrage territorial. La réforme en cours devra trouver un équilibre entre ces visions, en préservant à la fois la crédibilité, la mission de service public et la pérennité du modèle.

La révolution numérique en embuscade

Au-delà des structures, le véritable défi demeure la transformation numérique. Les médias publics doivent créer des plateformes digitales modernes, produire des contenus adaptés au mobile et aux jeunes publics, développer l’intelligence des données pour la recommandation, le ciblage et la personnalisation, tout en se positionnant face à la concurrence de Netflix, YouTube, TikTok ou encore des chaînes étrangères arabophones.

Une telle mutation exige des compétences nouvelles, une gouvernance plus souple, une vision éditoriale affirmée et des moyens techniques alignés sur les standards internationaux. L’ANGSPE, en tant qu’actionnaire, doit s’assurer que cette transition ne reste pas un simple exercice théorique.

​L’enjeu démocratique

Au fond, la réforme du secteur audiovisuel dépasse largement la seule économie des médias. Elle soulève des questions essentielles : qui produit l’information dans une démocratie encore en construction ? Comment garantir un accès équitable à une information de qualité, gratuite, plurielle et ancrée dans les réalités territoriales ? Peut-on moderniser sans privatiser, réformer sans affaiblir le lien public ? Les réponses à ces interrogations façonneront le rôle futur des médias publics dans le Maroc de demain, pris entre l’exigence d’audience et la responsabilité démocratique.

Vers un média public du XXIe siècle ?

Le Maroc est à un tournant. Il peut choisir de maintenir un système coûteux, obsolète et en perte d’influence. Ou bien il peut bâtir un nouveau modèle de média public, moderne, agile, crédible, soutenu par l’État mais indépendant dans sa ligne éditoriale.

L’ANGSPE, en tant que nouveau visage de l’État actionnaire, a la lourde tâche de faire de cette ambition une réalité. Cela passe par une gouvernance renouvelée, une stratégie éditoriale lisible, un ancrage numérique clair, et surtout une capacité à regagner la confiance du public.





Mercredi 16 Juillet 2025

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