L'ODJ Média



Salon maghrebin du livre d’Oujda : quand la litterature integre les grands enjeux d’avenir


Rédigé par Taoufiq Boudchiche le Lundi 29 Avril 2024

La capitale de l’Oriental a vibré du 17 au 21 avril au rythme de la quatrième édition du salon maghrébin du livre organisé par l’Agence de l’Oriental avec le soutien du Ministère de la culture et des autorités locales et dont le prestige a été rehaussé par le Haut Patronage Royal.



PAR TAOUFIQ BOUDCHICHE, ECONOMISTE

La plupart des éditeurs marocains ont été présents dans un espace de stands agréablement agencé. Le salon est aussi un moment privilégié de rencontres d’écrivains et d’intellectuels en provenance respectivement du Maghreb et du Moyen Orient (Tunisie, Lybie, Mauritanie, Egypte, Oman, Palestine, Jordanie, Irak), d’Afrique subsaharienne (Mali, Cameroun, Tchad), d’Europe (Danemark, France et Suisse) en plus de plusieurs auteurs nationaux qui ont fait le déplacement. 

Grâce à une organisation millimétrée à laquelle a veillé soigneusement l’Agence de l’Oriental, le temps du salon a été une fête permanente d’échanges culturels, intellectuels, artistiques et livresques. Des journées et des soirées agrémentées en ressources culturelles dont  l’Oriental a le secret : concerts de musique gharnatie, manifestations artistiques des groupes « El Arfa », expositions de peintures et de photographies d’artistes talentueux. 

L’absence d’auteurs algériens en raison de la stigmatisation par les autorités algériennes des intellectuels se déplaçant au Maroc, qui a atteint un sommet jamais atteint auparavant, n’aura pas empêché le succès de cette édition. Car, de « Maghreb », il en a été beaucoup question, en coulisses et lors des  tables rondes. L’utopie d’un Maghreb réuni, cultivée au lendemain des indépendances jusqu’aux années 1980, s’éloigne de plus selon les intellectuels présents tels que Mohammed Tozy  (Maroc) et Fauzya Charfi (Tunisie) dont la génération a rêvé d’un Maghreb du savoir, de la liberté et du progrès dans les années du militantisme et de  l’enthousiasme postcolonial. 

Aujourd’hui, force est de constater que les défis sont communs à l’ensemble des pays Maghrébins et plus largement africains, rappelle Chakib Guessous, dont les travaux sur la jeunesse rappellent les enjeux humains d’éducation, de déscolarisation, d’emploi, d’inclusion de la femme dans le développement. Demain, le Maghreb ? Fut le titre de la table ronde choisie par les organisateurs pour ce sujet où le point d’interrogation est probablement une marque de rupture contemporaine à cette utopie maintes fois ébranlée par les manœuvres dilatoires des généraux algériens. Des enjeux qui auraient été mieux gérés dans le cadre d’une approche régionale intégrée.  La tendance actuelle, en fin de compte, fait que chaque pays se replie sur ses intérêts stratégiques, en attendant des « temps » meilleurs pour l’Union Maghrébine, crée à Marrakech en 1989.  

D’ailleurs, conçu sur le thème du temps qui transparaît en filigrane de la thématique d’ensemble, les rencontres ont permis d’aborder, par le bais du regard littéraire,  les questions contemporaines telles que : écrire après la pandémie, la numérisation du monde et l’écriture, écriture et décolonisation du savoir, l’avenir de l’Afrique, la poésie en temps de crise, le temps de l’Islam, les questions linguistiques (arabe, amazigh, langues étrangères), les diasporas, l’intelligence artificielle…

Dans ce contexte, la littérature arabe et la question de la traduction ont fait l’objet de tables rondes de très haute facture animées par des auteurs arabophones du Maghreb et du Moyen Orient invitant à une réflexion sur l’avenir du roman arabe dans un monde dominé par le numérique, les dominations culturelles et linguistiques étrangères et l’hyper-connectivité. Un contexte de mutations profondes qui invite à embrasser des cultures multiples, souvent de manière superficielle, avec le risque d’une identité fragmentée source de fragilisations et de confusions culturelles et idéologiques.

D’où l’importance du rôle du traducteur dans le passage d’une langue à l’autre pour faire voyager le lecteur d’une culture à l’autre, sans « trahir », ni l’une, ni l’autre. On aura appris par exemple, de l’intervention des écrivains et traducteurs arabophones présents à l’instar du  marocain Mohammed El Arjouni, de l’égyptienne Dina Fathy Mandour et de la palestinienne Ghadir Abou Souneina, que le traducteur navigue, quasiment à contre gré, selon la métaphore proposée, entre plusieurs formes de « trahison » inhérentes à toute forme de traduction du texte original.

Il s’agira, dans le meilleur des cas,  d’une « trahison » tout court, sinon une trahison qualifiée de « créative » dans la forme et le fond ou encore une trahison « innovante » selon les contextes textuels pour faire passer au lecteur le sens du texte original dans toutes ses dimensions compréhensives. Une démarche créative qui nécessitera en permanence les compétences humaines de la traduction même dans un contexte de plus en plus dominé par le numérique et l’intelligence artificielle.

Le salon maghrébin du livre s’est également démarqué en donnant une place privilégiée à la jeunesse et à l’enfance. Plusieurs espaces ont été réservés aux enfants et aux écoliers venus nombreux et en groupes de classes dans une discipline impeccable participer aux ateliers de lecture et aux sessions de sensibilisation à l’importance du savoir littéraire.

Les organisateurs ont tenu en outre à offrir une place à la culture religieuse Soufie lors d’une table ronde animée par Sidi Mounir Kadiri Boudchiche, un jeune sachant soufi imprégné de multiples savoirs anthropologiques et spirituels qui est  basé à Madagh dans l’Oriental. Il a notamment rappelé que les traditions soufies emprunts de valeurs de tolérance et d’ouverture font partie intégrante des piliers de l’Islam marocain aux côtés du rite Malékite et de la doctrine Ascharite. Ils assurent, entre autres, dans le temps long, la quiétude spirituelle du citoyen marocain sous l’égide de la Commanderie des Croyants incarnée par Sa Majesté le Roi.

Mentionnons également les hommages rendus à des figures nationales tels que Feu Abdelkader Retnani dont l’action en faveur de l’édition et du livre a été soulignée tout au long du salon ainsi que lors d’une cérémonie consacrée à sa mémoire en présence de son épouse et de ses proches. Il y eut aussi à l’occasion de la présentation d’un ouvrage qui lui a été consacré un hommage à Feu El Bekkaï Lehbil Mbarek, le premier Premier Ministre, nommé par Feu le Roi Mohammed V au lendemain de l’indépendance du Royaume.

Enfin un grand bravo aux commissaires du salon le Docteur Jalil Bennani et Monsieur Jalal Hakmaoui qui ont pleinement réussi cette quatrième édition du salon maghrébin du livre sous la supervision de l’équipe de l’Agence de l’Oriental.

Une édition rehaussée par le Haut Patronage Royal. L’équipe de l’Agence de l’Oriental, malgré un effectif restreint,  s’est pleinement mobilisée aux côtés  de Mohammed Mbarki, le Directeur Général et Président du Salon pour en assurer la préparation et la réalisation. Une mention particulière également aux autorités locales, avec à leur tête le Wali de la Région et Gouverneur de la Préfecture d’Oujda, Monsieur Mouad Jamaï, qui a honoré de sa présence et de ses interventions les moments forts de cette édition.





Lundi 29 Avril 2024

Dans la même rubrique :
< >

Mercredi 15 Mai 2024 - 10:23 Le Siel, 29 éditions plus tard…

Chroniqueurs invités | Lifestyle | Breaking news | Portfolio | Room | L'ODJ Podcasts - 8éme jour | Les dernières émissions de L'ODJ TV | Communiqué de presse | Santé & Bien être | Sport | Culture & Loisir | Conso & Environnement | Digital & Tech | Eco Business | Auto-moto | Musiczone | Chroniques Vidéo | Les Chroniques Radio | Bookcase | L'ODJ Média























Menu collant à droite de la page