Au-delà de ce taux de chômage déjà préoccupant, d'autres données méritent une attention particulière. Par exemple, le rapport indique une perte de 209.000 emplois non rémunérés en 2023, dont 190.000 en milieu rural, très probablement liés au secteur agricole. Cette hypothèse est renforcée par l'estimation d'une perte d'environ 202.000 postes dans l'agriculture, un chiffre presque équivalent au nombre d'emplois non rémunérés évoqués. Comment interpréter ces pertes massives d'emplois dans un secteur clé de l'économie marocaine ?

D'un autre côté, la note du HCP, basée sur une enquête auprès d'un échantillon représentatif, mentionne la création de 59.000 emplois rémunérés. Parallèlement, la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) enregistre 316.000 nouveaux salariés déclarés en 2023. En ajoutant les 30.000 postes nouvellement créés dans l'administration publique, le total atteint 346.000 emplois rémunérés. En élargissant l'analyse à l'auto-emploi, aux travailleurs indépendants et aux recrutements dans les entreprises publiques, on dépasse largement les 400.000 nouveaux emplois. Comment ces chiffres se concilient-ils avec le taux de chômage annoncé ?

Cette divergence entre les pertes d'emplois non rémunérés, principalement dans l'agriculture, et la création significative d'emplois rémunérés soulève des interrogations fondamentales. Quelles sont les dynamiques à l'œuvre sur le marché du travail marocain ? Comment expliquer cette apparente contradiction entre la perte d'emplois dans un secteur traditionnellement important et la création d'emplois dans d'autres secteurs ?

L'analyse de ces chiffres révèle la complexité du marché de l'emploi au Maroc et met en évidence la nécessité d'une approche nuancée pour comprendre les réalités économiques et sociales du pays. Les statistiques, aussi précises soient-elles, peuvent parfois masquer des dynamiques sous-jacentes et des défis spécifiques à certains secteurs ou régions.

La guerre des chiffres du chômage au Maroc continue donc, non seulement dans les médias et les débats publics, mais aussi dans les efforts des analystes et des décideurs pour déchiffrer les tendances du marché de l'emploi. Dans ce contexte, une question demeure centrale : comment le Maroc peut-il concilier ces réalités diverses pour forger une stratégie d'emploi inclusive et durable ?

En définitive, les chiffres du chômage et de l'emploi au Maroc, loin d'offrir une image claire et univoque, invitent à une réflexion approfondie sur les politiques économiques et sociales nécessaires pour répondre aux défis du marché de l'emploi.

La compréhension de ces dynamiques est cruciale pour élaborer des réponses adaptées aux besoins des citoyens marocains et pour favoriser une croissance économique inclusive et durable.