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​Projet de loi 16.22 : la réforme qui fâche les adouls


Rédigé par La rédaction le Mardi 2 Décembre 2025



Adopté en Conseil de gouvernement puis transmis pour examen parlementaire, le projet de loi 16.22 devait moderniser une profession séculaire : celle des adouls.

Annoncé comme une avancée attendue depuis des années, le texte provoque pourtant une onde de choc dans les rangs d’un corps qui se dit « incompris » et « dépossédé » de garanties essentielles pour exercer correctement son métier.

Entre attentes déçues, reculs inattendus et contradictions difficiles à justifier, la réforme soulève plus de questions qu’elle n’en résout.

Une réforme très attendue… devenue source de crispation

Depuis le début des consultations entre le ministère de la Justice et l’Ordre national des adouls, l’espoir d’un cadre juridique moderne avait été largement nourri. La profession réclamait un texte aligné sur les besoins d'aujourd’hui : sécurisation des transactions, transparence, égalité entre les sexes, harmonisation avec les autres professions notariales.
Mais au fil des allers-retours entre les départements ministériels et le Secrétariat général du gouvernement, plusieurs dispositions centrales ont disparu de la version finale. Les adouls parlent désormais d’un texte « incomplet », qui reflète seulement une partie des engagements pris.

Le “compte des dépôts” : la grande absente de la réforme

C’est le nerf de la guerre.
La profession réclamait l’instauration d’un compte de dépôts à la CDG, un dispositif déjà utilisé par les notaires et recommandé par la Charte de la réforme du système judiciaire.
Objectif : sécuriser les transactions de vente, empêcher les remises directes d’argent entre particuliers et faciliter la déclaration de soupçon dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux.

Dans la version finale, cette disposition a disparu.

Pour Soulaiman Adkhou, président de l’Ordre national des adouls, cela crée une discrimination évidente entre professions notariales :
« Le prix d’une vente ne devrait jamais être remis de la main à la main. Il doit transiter par un compte sécurisé au nom de l’adoul, comme c’est déjà le cas pour d’autres professions. Sans cela, la transparence et la protection des cocontractants restent fragiles. »

Plus grave encore, l’absence de ce compte prive l’adoul des moyens nécessaires pour signaler une transaction suspecte conformément à la loi 43-05. Dans de nombreux cas, l’adoul n’assiste même pas à la remise de l’argent : comment, dès lors, déclarer un soupçon ?

Le Lafif : un archaïsme juridique maintenu malgré les protestations

Autre sujet sensible : la procédure du Lafif, héritée de la tradition malékite, utilisée pour trancher des litiges relatifs à l’héritage, à la filiation ou au décès.
Actuellement, le Lafif impose la présence de 12 témoins, un seuil que les adouls jugent aussi irréaliste qu’injustifié.

Ils proposent de le réduire à 6 témoins, une mesure qui allégerait considérablement la charge des justiciables. Car dans la pratique, réunir 12 personnes ayant réellement assisté à un acte relève souvent du casse-tête. Résultat : les procès se prolongent, des justiciables renoncent à leurs droits, et la justice se retrouve paralysée par un dispositif figé dans le temps.

Femmes adouls : une avancée symbolique contredite par une exclusion incompréhensible

Le texte reconnaît enfin aux femmes le droit d’exercer la profession d’adoul. Une évolution saluée unanimement. Mais dans le même mouvement, il leur interdit de témoigner dans le cadre du Lafif.
Autrement dit : une femme adoul peut rédiger des actes, authentifier, accompagner des transactions… mais son témoignage reste juridiquement irrecevable dans cette procédure.

Cette incohérence soulève l’indignation.

« Cela va à l’encontre des principes d’égalité et des conventions internationales ratifiées par le Maroc », souligne le président de l’Ordre. D’autant que le Conseil supérieur des Oulémas n’a exprimé aucune objection à la participation des femmes à cette procédure.

Certaines situations exigent même qu’une femme témoigne, notamment dans des affaires relatives à l’intimité ou à l’espace réservé aux femmes. Le maintien de cette exclusion est perçu comme une contradiction flagrante avec l’esprit de la réforme.

Une profession qui promet de défendre ses droits jusqu’au bout

Face à ces reculs, les adouls se mobilisent. Ils comptent défendre leurs revendications au Parlement avec les élus de la nation. Et si le texte n’est pas amendé dans le sens attendu, ils envisagent de saisir SM le Roi, garant de la sécurité juridique et protecteur des professions de justice.

Pour eux, le projet de loi 16.22 ne doit pas seulement moderniser l’image d’une profession vieille de plusieurs siècles ; il doit aussi garantir sa crédibilité, son efficacité et son alignement avec les standards internationaux de transparence.

Une modernisation inachevée

Le projet de loi 16.22 contient des avancées indéniables, mais il reste traversé de contradictions profondes. En supprimant des garanties essentielles et en maintenant des dispositions jugées obsolètes ou discriminatoires, il rate partiellement son objectif : celui de moderniser l’une des professions les plus anciennes et les plus symboliques de l’espace juridique marocain.

Pour l’heure, les adouls attendent une révision sérieuse du texte. Sans quoi cette réforme, censée être une promesse d’avenir, risquerait d’être perçue comme un rendez-vous manqué avec la modernité.

​Le projet de loi 16.22 en quatre points clés

Un texte jugé incomplet
La réforme était censée moderniser la profession d’adoul, mais plusieurs engagements essentiels ont disparu de la version finale. Les professionnels dénoncent une modernisation « de façade » qui laisse intactes des pratiques jugées obsolètes.

Le “compte des dépôts”, grande revendication abandonnée
La suppression du compte de dépôts à la CDG crée une inégalité avec les notaires et affaiblit la transparence des transactions. Sans ce mécanisme, l’adoul ne peut ni sécuriser les paiements ni déclarer efficacement un soupçon dans un dossier de blanchiment.

Le Lafif, symbole d’un archaïsme maintenu
La procédure repose encore sur 12 témoins, un nombre jugé excessif et inadapté à la réalité. Les adouls demandent de ramener ce seuil à 6 pour réduire les délais et faciliter l’accès des justiciables à la preuve.

Une égalité homme-femme inachevée
Le texte autorise les femmes à devenir adouls… mais leur interdit de témoigner dans le Lafif. Un paradoxe dénoncé comme une discrimination persistante, sans fondement religieux ni juridique sérieux.





Mardi 2 Décembre 2025

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