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8 et 9 mai : l’héritage divisé des Alliés de la Seconde Guerre mondiale

Entre mémoire partagée et fractures géopolitiques


Rédigé par le Jeudi 8 Mai 2025

Le mois de mai, porteur des parfums de printemps, nous rappelle chaque année les heures sombres et glorieuses de l’histoire mondiale. En France, le 8 mai 2025, comme chaque année, les drapeaux tricolores flottent pour célébrer la capitulation de l’Allemagne nazie en 1945. Le lendemain, en Russie, le 9 mai, les avenues de Moscou résonnent sous les pas des défilés militaires, tandis que les vétérans arborent fièrement leurs médailles, témoins d’une époque où le monde entier s’était uni contre la barbarie. Pourtant, derrière ces commémorations apparemment similaires, se dessinent des fractures profondes, héritées de la guerre froide et exacerbées par les bouleversements géopolitiques actuels.



Le poids de la guerre froide : des alliés devenus rivaux

En 1945, les Alliés, unis par la nécessité, avaient triomphé d’un ennemi commun. La France, libérée par les efforts conjugués de la Résistance, des forces alliées anglo-américaines et des sacrifices soviétiques, célèbre le 8 mai comme une victoire de la liberté et des valeurs démocratiques. À Paris, les cérémonies sont empreintes de sobriété et d’un hommage solennel aux victimes civiles et militaires. Le message est clair : la mémoire est un rempart contre le retour des tyrannies.

En Russie, le 9 mai, connu sous le nom de "Jour de la Victoire", prend une dimension différente. Ici, la mémoire collective est marquée par le sacrifice ultimede 27 millions d'Hommes. La victoire n’est pas seulement célébrée, elle est brandie comme un pilier de l’identité nationale. Les chars défilent sur la Place Rouge, les discours exaltent la puissance retrouvée et l’héroïsme du peuple russe. Ce jour-là, Moscou se pare d’une fierté presque guerrière, rappelant au monde que la Russie fut l’un des principaux artisans de la défaite nazie.

Ce contraste dans les célébrations reflète deux récits historiques distincts. En France, la victoire est une victoire partagée, un triomphe des valeurs universelles. En Russie, elle est une victoire nationale, presque exclusive, un symbole de résilience face à un Occident perçu comme ingrat et oublieux du rôle soviétique.

La fracture entre ces deux visions trouve ses racines dans la guerre froide. Dès 1947, l’euphorie de la victoire commune s’évanouit pour laisser place à un monde bipolaire. L’alliance contre le nazisme se mue en confrontation idéologique et militaire entre l’Occident, mené par les États-Unis, et l’Union soviétique. Les anciens alliés deviennent des adversaires, et la mémoire de la guerre se politise.

En France, membre fondateur de l’OTAN, la mémoire du 8 mai est intégrée dans le récit occidental de la démocratie triomphante. En Russie, la mémoire du 9 mai devient une arme idéologique, utilisée pour légitimer le régime soviétique puis, après 1991, le pouvoir de Vladimir Poutine. Chaque camp instrumentalise le passé pour renforcer ses positions dans le présent.

Cette divergence s’est accentuée ces dernières années, notamment avec la guerre en Ukraine. En 2025, les célébrations du 9 mai en Russie sont marquées par la rhétorique anti-occidentale. Moscou accuse l’OTAN de menacer sa sécurité, tandis que l’Occident l'accuse de nourrir des ambitions impérialistes. 

Pour un observateur marocain, ces commémorations offrent une leçon précieuse sur la complexité de l’histoire et des relations internationales. Le Maroc, qui a lui-même contribué à l’effort de guerre allié avec la participation de milliers de soldats marocains, peut s’interroger sur la manière dont les grandes puissances façonnent la mémoire collective à des fins géopolitiques.

Le clivage entre le 8 mai français et le 9 mai russe illustre comment l’histoire peut être utilisée pour diviser autant que pour unir. Il rappelle également que la mémoire n’est jamais neutre : elle est un outil de pouvoir, un miroir des ambitions politiques. En tant que pays du Sud, le Maroc peut tirer des enseignements de cette fragmentation mémorielle pour réfléchir à sa propre histoire et à la manière dont elle est racontée, entre influences coloniales et aspirations nationales.

Dans un monde marqué par des tensions croissantes, les commémorations de la victoire de 1945 devraient être l’occasion de rappeler l’importance de l’unité face aux défis communs. Pourtant, elles sont aujourd’hui le reflet des divisions géopolitiques. La France et la Russie, autrefois alliées, célèbrent séparément, avec des messages souvent opposés.

Pourtant, l’histoire nous enseigne que les alliances, même improbables, peuvent naître de la nécessité. En 1945, des nations aux idéologies radicalement différentes ont uni leurs forces pour vaincre la menace Nazi. Peut-être est-il temps, en 2025, de réapprendre cette leçon. Car si la mémoire de la Seconde Guerre mondiale continue de diviser, elle contient aussi les germes d’une réconciliation possible, fondée sur la reconnaissance mutuelle des sacrifices et des contributions de chacun.

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Mamoune ACHARKI
Journaliste junior passionné par l'écriture, la communication, les relations internationales et la... En savoir plus sur cet auteur
Jeudi 8 Mai 2025

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