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Automobile : La classe moyenne au Maroc a voté chinois !


Rédigé par le Mercredi 22 Octobre 2025

Au dernier salon de Casablanca, 100% dédié à l’hybride et à l’électrique, le public s’est pressé autour des stands BYD, Jetour, Leapmotor, Lynk & Co, Smart ou encore XPeng. Un signal fort : quand l’équation “prix/équipement/consommation” devient décisive, la préférence des ménages marocains glisse, sans complexe, vers l’offre chinoise — là où l’innovation est visible et le ticket d’entrée, maîtrisé.



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Transition auto : quand le rapport qualité-prix fait basculer le vote des ménages

Il fallait voir les files à l’Espace AUDA (Anfa Park) entre le 18 et le 28 septembre 2025 : un salon « spécial énergies nouvelles » — hybride et 100 % électrique —, ouvert au grand public, avec billet à 30 DH, et une promesse simple : rendre tangible, ici et maintenant, la bascule vers la mobilité propre. Dans les allées, plus de trente marques, une soixantaine de modèles électrifiés, et surtout la montée en puissance des constructeurs chinois, passés en deux ans du statut d’outsiders à celui d’attracteurs de foule. Ce n’est pas un slogan marketing : c’est une scène vécue. 

La photo la plus parlante ? BYD dévoilant le Sealion 7, SUV 100 % électrique, pendant que les visiteurs enchaînaient questions sur autonomie, cycles de recharge et garanties. L’ouverture de la gamme BYD au Maroc — Atto 3, Seal, Seal U PHEV, Han, Tang — place des repères de prix dans l’imaginaire des classes moyennes : 339 900 DH pour l’Atto 3, 359 900 DH pour le Seal U PHEV, 469 900 DH pour la berline Seal. De quoi rebattre les cartes face aux premiums européens et aux généralistes japonais ou coréens, dont les hybrides restent souvent plus chers à puissance et dotation comparables. 

Dans les chiffres, le phénomène n’est plus anecdotique. Selon les statistiques AIVAM, BYD a bondi à 466 VP vendus en juillet 2025 (contre 9 un an plus tôt), portant sa part de marché mensuelle à 2,63 %. C’est une percée éclair qui confirme une tendance : les nouvelles marques asiatiques ne viennent plus “tester” le marché marocain ; elles s’y installent, réseau à l’appui, et captent un appétit d’équipement tiré par la reprise du pouvoir d’achat urbain et le besoin de rationaliser le coût total de possession. 

Pourquoi la classe moyenne “vote” chinois ? Parce que, pour elle, l’auto n’est pas un manifeste idéologique, c’est un budget. Or l’offre chinoise coche trois cases décisives : prix d’accès plus doux, niveau d’équipement très généreux (ADAS, écrans, sécurité active), et coût d’usage comprimé par l’électrification. Les PHEV répondent bien aux usages mixtes (ville + périurbain), tandis que les EV pur jus s’imposent comme deuxième voiture de ménage ou comme véhicule principal pour les trajets quotidiens. Ajoutez à cela des garanties longues et des mises à jour logicielles fréquentes ; le package devient difficile à battre.

Le contexte public accélère la bascule. En 2025, plusieurs sources sectorielles rappellent un cadre d’incitations favorable aux véhicules électriques : exonérations ou allègements sur TVA et droits à l’import, vignette allégée ou nulle, et coût d’électricité hors pointe compétitif. Certes, les textes évoluent et les modalités diffèrent selon les segments, mais la direction est claire : rendre l’électrique plus accessible. À mesure que ces incitations se stabilisent et que les importateurs structurent le financement, le “panier” mensuel devient comparable — voire inférieur — à celui d’un thermique récent. 

Reste la fameuse question des bornes. Ici, l’argument “on ne peut pas recharger” s’effrite. Entre initiatives privées et projets publics (IRESEN, Green Energy Park), l’ossature progresse : corridors autoroutiers équipés, hubs urbains, déploiements chez les distributeurs et en copropriété. Le projet Green Miles a déjà maillé l’axe Tanger–Agadir par 37 points de charge ; et la multiplication des salons EV, démonstrations et centres d’essai rassure des automobilistes longtemps hésitants. Est-ce parfait ? Non. Est-ce suffisant pour une montée en charge graduelle ? Oui. 

Hybride, PHEV, EV : la nouvelle hiérarchie marocaine parle mandarin

Le Maroc, de surcroît, se positionne intelligemment dans la chaîne de valeur. Alors que l’Europe surtaxe les EV chinois (jusqu’à 35 %), Pékin pousse ses champions à l’international et redéploie ses surcapacités. Dans ce jeu d’échecs, le Royaume attire les investissements amont — batteries, composants — grâce à son mix énergétique, ses accords commerciaux et l’écosystème Renault–Stellantis déjà exportateur net vers l’UE. Pour les ménages, cela se traduit demain par plus de choix, des délais plus courts et, potentiellement, des prix mieux tenus. 

Faut-il pour autant s’enthousiasmer sans réserve ? Non plus. Trois vigilances s’imposent.
 
  1. Valeur résiduelle : des marques nouvelles doivent prouver, sur cinq à sept ans, la tenue de leurs cotes à l’occasion de la revente. Sans historique massif d’occasions, l’acheteur supporte une part de risque — qui doit être compensée par le prix d’achat, la garantie et un réseau après-vente solide.
  2.  
  3. Service et pièces : les distributeurs locaux ont un enjeu de capacité (carrossiers, électriciens HV, pièces critiques). Une promesse de disponibilité J+X jours vaut souvent mieux qu’un prix barré séduisant.
  4.  
  5. Réseau de charge : il faut passer d’une logique vitrine (salons, flagship, axes pilotes) à une logique maillée (quartiers résidentiels, parkings d’entreprises, copropriétés). Le ticket de confiance de la classe moyenne dépendra autant des kWh accessibles que du marketing.


Ce “vote” de la classe moyenne n’est donc pas un coup de tête : c’est un vote de portefeuille et un vote d’usage. Quand un SUV PHEV bien équipé se négocie autour de 360 000–380 000 DH, avec des coûts d’entretien compressés et une autonomie électrique suffisante pour la semaine, il marque des points décisifs. Et quand l’alternative EV pur, à 340 000–470 000 DH, couvre le quotidien urbain avec une charge de nuit sécurisée, l’arbitrage devient rationnel — surtout face à des thermiques qui, eux, voient encore grimper l’entretien et le carburant. 

Signal politique, aussi. Le succès populaire du salon “énergies nouvelles” montre que la transition ne se fera ni à la baguette, ni par culpabilisation, mais par compétition concrète : celle des prix, des garanties, de la recharge, des délais. Si les acteurs historiques veulent reconquérir la classe moyenne, ils devront sortir de la zone grise — l’hybride “tiède” et trop cher — pour assumer des propositions nettes : PHEV bien dotés et agressifs en loyers, EV compacts “prix plancher”, packages recharge + maintenance, et revente garantie.

Au fond, le message envoyé depuis Casablanca est limpide : les ménages marocains n’attendent pas 2035 pour changer de paradigme. Ils veulent des voitures sobres, sûres, connectées, livrables et finançables. Ceux qui cochent ces cinq cases — aujourd’hui, majoritairement, des marques chinoises — emportent le bulletin. Le reste appartient à la concurrence… et à l’infrastructure, qui doit suivre le rythme du marché.

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Mohamed Ait Bellahcen
Un ingénieur passionné par la technique, mordu de mécanique et avide d'une liberté que seuls l'auto... En savoir plus sur cet auteur
Mercredi 22 Octobre 2025

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