Ce week-end, les moteurs rugiront à nouveau dans les forêts ardennaises, sur un tracé où la vitesse tutoie la gravité et où les champions se forgent souvent dans la tourmente. Spa-Francorchamps, terrain mythique, théâtre d’exploits autant que de chaos, s’apprête à accueillir le 13ᵉ rendez-vous d’une saison qui entre dans sa phase décisive. Et si la mi-temps est déjà consommée, les hostilités, elles, ne font que commencer.

Trois semaines après un Silverstone éclaboussé de papaya et de surprises venues d’ailleurs, les projecteurs se braquent à nouveau sur l’élite du sport automobile. McLaren débarque en territoire belge avec la confiance des géants. Oscar Piastri, serein leader du championnat, et Lando Norris, plus affamé que jamais, mènent une bataille interne aussi haletante que fratricide. Huit petits points les séparent, et Spa pourrait bien redessiner les contours de cette rivalité. La pluie, annoncée tout au long du week-end, viendra-t-elle troubler les certitudes ? Sur ce circuit qui flirte avec les éléments, rien ne semble jamais écrit.

Derrière le duo infernal, Ferrari joue son va-tout. À la croisée des chemins, la Scuderia introduit à Spa son nouveau package technique : suspension arrière revue, ambitions rehaussées, et l’espoir surtout de ne pas laisser filer le train McLaren. Charles Leclerc rêve d’un retour aux avant-postes là où il s'était imposé en 2019, tandis que Lewis Hamilton, pour sa première saison sous la bannière rouge, veut plus qu’un simple top 5. Il veut gagner. Mais gagner à Spa demande plus qu’un bon châssis, il exige du courage et de la justesse, particulièrement lorsqu’on n’a qu’une seule séance d’essais pour ajuster les moindres détails.

Et puis il y a Red Bull. Dans l’ombre, pour une fois. Non pas en raison de performances en berne, mais parce qu’un séisme interne a secoué l’écurie autrichienne. Christian Horner n’est plus, Laurent Mekies prend le relais. Un changement de cap brutal, survenu en pleine saison, qui propulse le Français sous les feux de la rampe. Max Verstappen, triple vainqueur consécutif ici, en est à la croisée des émotions. S’il y a bien un endroit où il peut reprendre la main, c’est ici, dans cette vallée qu’il chérit plus que toute autre. En quête d’une 45ᵉ pole position, le Néerlandais garde ses repères, même si l’univers autour de lui tangue.

Mercedes aussi aura son mot à dire. George Russell et Lewis Hamilton connaissent bien les lieux, et l’équipe n’a pas dit son dernier mot. Surtout sur un circuit où tout peut basculer : un virage mal négocié, une pluie mal anticipée, un choix de pneus trop optimiste. D’ailleurs, la météo, fidèle à sa réputation, promet de jouer les trouble-fêtes. Brouillard, averses, soleil timide : le ciel belge a lui aussi décidé de participer à la course.

Au-delà du Grand Prix lui-même, Spa accueillera également une manche Sprint, condensant les enjeux et réduisant la marge d’erreur. Pas de place à l’approximation. Une séance d’essais, une qualif Sprint, une course Sprint, puis une qualif officielle pour le dimanche. Quarante-quatre tours dimanche sur un ruban d’asphalte de 7 kilomètres, 19 virages, et 320 km/h en ligne droite. Autant dire, une danse avec les limites.

Derrière les leaders, la meute s’agite. Sauber, emmenée par un Nico Hülkenberg ressuscité, veut continuer à surprendre. Aston Martin, Alpine ou encore Williams guettent le moindre faux pas des cadors pour s’immiscer dans les débats. Chaque point compte. Chaque dépassement peut peser dans le classement final.

À Spa, tout est possible. C’est d’ailleurs pour cela qu’on l’aime autant. Circuit d’hommes, d’instincts et d’imprévus. Là où les erreurs ne pardonnent pas et où la gloire n’attend pas. Alors que les feuilles des arbres belges commencent à frémir, la Formule 1 s’apprête à écrire un nouveau chapitre de son épopée. L’encre sera peut-être détrempée, les trajectoires tremblantes, mais une chose est certaine : ce Grand Prix ne laissera personne indifférent.