Par Adnane Benchakroun
Je l’avoue sans détour : je faisais partie de ceux qui, chaque soir, ouvraient YouTube pour écouter la dernière sortie d’un influenceur politique marocain. Par curiosité, par devoir d’analyse, parfois par simple pulsion de veille citoyenne. Qu’ils soient installés au Maroc ou en exil, ces figures sont devenues, qu’on le veuille ou non, des voix puissantes dans le paysage politique informel. Et j’y ai trouvé, à un moment donné, une extension utile de la presse officielle souvent trop prudente ou complaisante. Mais aujourd’hui, j’appuie sur "pause". Et plus encore : j’entre en grève du visionnage.
Ce n’est pas une lubie de vieux ronchon fatigué des écrans. C’est une décision mûrement réfléchie, née d’un dégoût croissant. Car ce qui se donne pour de l’« information libre », de la « critique courageuse » ou du « journalisme citoyen » vire trop souvent à la désinformation crasse, au populisme sans fond, au nihilisme déguisé en lucidité. Les vidéos se ressemblent, les indignations s'enchaînent, les mêmes mots sont répétés comme des mantras vides : « mafia », « système », « trahison », « complot ». Et au bout, il ne reste rien. Aucun projet, aucune pensée, aucun espoir. Juste une colère rentable.
Car c’est bien là le nœud du problème : le contenu politique sur YouTube est devenu un marché. Ce n’est plus la recherche de vérité ou l’éveil des consciences qui motive ces influenceurs, mais le « watch time », les likes, les dons, la monétisation. On parle de politique comme on vendrait des potins ou des clashs, avec des titres racoleurs, des formules chocs, des vérités tronquées. Et qu’importe si les faits sont douteux, si les accusations sont graves, si les montages sont biaisés : ce qui compte, c’est que ça tourne.
Ce qui me dérange profondément, c’est la transformation de la critique politique en spectacle. Un spectacle qui finit par nous anesthésier plutôt que de nous réveiller. Qui nous fait croire que tout est foutu, que tout le monde est pourri, que rien ne vaut la peine d’être sauvé. Or, cette vision du monde est aussi fausse que dangereuse. Elle tue l’engagement, elle dépolitise au nom d’une surpolitisation de façade, elle désespère la jeunesse sous couvert de l’éclairer.
Alors j’ai décidé de dire stop. Une grève d’un mois. Une pause volontaire, lucide, assumée. Non pas pour me couper du monde, mais pour reprendre la main sur mes outils d’analyse. Pour relire, pour réécouter des voix sérieuses, pour réapprendre à douter sainement. Et surtout pour faire le tri : entre la critique légitime et l’instrumentalisation cynique de la colère populaire.
Ce n’est pas un appel à censurer ces influenceurs. Ils ont le droit de parler, et certains apportent même des éléments intéressants, quand ils s’astreignent à l’exigence intellectuelle. Mais c’est un appel à la vigilance. À la responsabilité du spectateur. Car nous sommes aussi responsables de la qualité du débat public que nous alimentons. En regardant sans recul, nous encourageons les dérives. En applaudissant l’outrance, nous tuons la nuance.
Je ne suis pas naïf. Dans un mois, j’y reviendrai peut-être, avec un autre regard. Mais pour l’instant, je choisis le silence critique plutôt que le bruit vide. Parce que penser, c’est parfois se taire pour mieux entendre ce qui est vrai.
Et si cette pause devenait un rituel collectif ? Une "semaine sans YouTubeurs politiques", un "ramadan numérique", pour se désintoxiquer et reconstruire notre rapport à l'information citoyenne ? Ce serait, peut-être, le premier acte politique du spectateur moderne.
Ce n’est pas une lubie de vieux ronchon fatigué des écrans. C’est une décision mûrement réfléchie, née d’un dégoût croissant. Car ce qui se donne pour de l’« information libre », de la « critique courageuse » ou du « journalisme citoyen » vire trop souvent à la désinformation crasse, au populisme sans fond, au nihilisme déguisé en lucidité. Les vidéos se ressemblent, les indignations s'enchaînent, les mêmes mots sont répétés comme des mantras vides : « mafia », « système », « trahison », « complot ». Et au bout, il ne reste rien. Aucun projet, aucune pensée, aucun espoir. Juste une colère rentable.
Car c’est bien là le nœud du problème : le contenu politique sur YouTube est devenu un marché. Ce n’est plus la recherche de vérité ou l’éveil des consciences qui motive ces influenceurs, mais le « watch time », les likes, les dons, la monétisation. On parle de politique comme on vendrait des potins ou des clashs, avec des titres racoleurs, des formules chocs, des vérités tronquées. Et qu’importe si les faits sont douteux, si les accusations sont graves, si les montages sont biaisés : ce qui compte, c’est que ça tourne.
Ce qui me dérange profondément, c’est la transformation de la critique politique en spectacle. Un spectacle qui finit par nous anesthésier plutôt que de nous réveiller. Qui nous fait croire que tout est foutu, que tout le monde est pourri, que rien ne vaut la peine d’être sauvé. Or, cette vision du monde est aussi fausse que dangereuse. Elle tue l’engagement, elle dépolitise au nom d’une surpolitisation de façade, elle désespère la jeunesse sous couvert de l’éclairer.
Alors j’ai décidé de dire stop. Une grève d’un mois. Une pause volontaire, lucide, assumée. Non pas pour me couper du monde, mais pour reprendre la main sur mes outils d’analyse. Pour relire, pour réécouter des voix sérieuses, pour réapprendre à douter sainement. Et surtout pour faire le tri : entre la critique légitime et l’instrumentalisation cynique de la colère populaire.
Ce n’est pas un appel à censurer ces influenceurs. Ils ont le droit de parler, et certains apportent même des éléments intéressants, quand ils s’astreignent à l’exigence intellectuelle. Mais c’est un appel à la vigilance. À la responsabilité du spectateur. Car nous sommes aussi responsables de la qualité du débat public que nous alimentons. En regardant sans recul, nous encourageons les dérives. En applaudissant l’outrance, nous tuons la nuance.
Je ne suis pas naïf. Dans un mois, j’y reviendrai peut-être, avec un autre regard. Mais pour l’instant, je choisis le silence critique plutôt que le bruit vide. Parce que penser, c’est parfois se taire pour mieux entendre ce qui est vrai.
Et si cette pause devenait un rituel collectif ? Une "semaine sans YouTubeurs politiques", un "ramadan numérique", pour se désintoxiquer et reconstruire notre rapport à l'information citoyenne ? Ce serait, peut-être, le premier acte politique du spectateur moderne.












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