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L'utile rappel moral et politique d'el Mostapha Ramid




Par Aziz Boucetta

Pour qui ne le connaîtrait pas, Me el Mostapha Ramid est l’ancien ministre  PJD de la Justice (et des Libertés) dans les gouvernements Benkirane I et II, puis ministre des Droits de l’homme sous Elotmani I. Ténor du barreau, ex-stentor au PJD, mentor d’une frange de militants du PJD, l’homme est rugueux, rigide, mais profondément intègre. Ces derniers mois, on ignore pourquoi, il se rappelle au bon souvenir des Marocains par des sorties bien calibrées, dont l’une des dernières, sous forme de statut sur Facebook.

Qu’y dit-il ? Quelque chose de fondamentalement important pour notre scène politique, quelque chose qui porterait les relations entre gouvernés et gouvernants à un point d’éthique, et donc un niveau de confiance et peut-être même d’estime, jamais atteint… mais qu’ils ont déjà connu, jadis. Me Ramid explique que dans leurs relations, les politiques et les médias s’évitent et se méfient mutuellement les uns des autres, le politique n’aimant pas les articles sur sa personne, sa gestion, ses erreurs, voire ses errements, et le journaliste refusant d’être traîné en justice par un politique qui voudrait défendre son honneur à ses yeux bafoué par ce journaliste. Or, selon l’ancien ministre, sont ou devraient être soumis aux principes de l’éthique et de la reddition des comptes aussi bien les politiques que les journalistes. Les premiers, selon l’ancien ministre, sont tenus de recourir à la justice dans le cas où ils seraient cités dans un article qu’ils estimeraient offensant ou diffamatoire à leur endroit ; ce faisant, ils défendraient ainsi leur intégrité et leur réputation, et en même temps montreraient des égards aux médias. Dans le cas contraire, ils prêteraient le flanc aux écrits les concernant, tout en montrant leur mépris pour les médias. Une action en justice ne doit cependant pas être faite dans une volonté de vengeance ou de « mise hors d’état de nuire » du journaliste auteur de l’article ou du reportage et, en cas d’excuses dudit journaliste, le politique doit abandonner ses poursuites judiciaires.

Me Ramid a raison. Nous vivons en effet dans un pays qui donne le sentiment que politiques et médias cheminent sur deux voies parallèles qui, comme chacun sait, ne se rencontrent jamais… Les premiers agissent comme ils l’entendent, étant convaincus d’être dans le vrai, sans entendre les seconds qui écrivent et s’expriment comme ils le jugent utile, persuadés de porter la voix du juste, du bien et du bon. Or, la vérité se situe quelque part entre les deux : les politiques ne sont pas toujours portés par leur éthique et les journalistes ne font pas tous montre de professionnalisme dans leurs productions.

C’est pour cela que la justice existe, et qu’elle doit juger les affaires opposant journalistes et politiques aux termes du code de la presse qui prévoit avec une certaine exhaustivité tous les cas d’injure ou de diffamation. Or, que n’a-t-on entendu de faits impliquant des ministres dans bien des turpitudes : enrichissement illicite, conflit d’intérêt, népotisme, prise illégale d’intérêts … Et il faut bien le reconnaître, le gouvernement actuel prête le flanc à bien des accusations concernant ses membres, qui nse reconnaîtront, et le premier d’entre eux en premier. Mais rien, très peu de réactions des politiques, sauf quand ils sont sûrs de gagner en justice.

Or le danger survient lorsque les règles ne sont pas respectées, que les politiques ignorent ce qui se dit et s’écrit sur eux par des journalistes sérieux, crédibles et qui s’appuient sur des faits ; et alors,  c’est l’opinion publique qui prend le relais. Et la voix de cette opinion publique est singulièrement amplifiée par les réseaux sociaux et aussi, il faut le dire, par cette propension d’une partie de la société au « voyeurisme », alimentant ainsi encore plus « la machine à rumeurs ». Car, même quand une info est vraie sur des turpitudes de responsables, quand les réseaux s’en saisissent, la voie demeure ouverte aux rumeurs, aux attaques directes, à l’amplification des faits, voire aux injures.

Il est certes difficile de répondre à la publication d’un fait répréhensible commis par un responsable administratif ou politique. Me el Mostapha Ramid avait lui-même été en 2020 le « héros malgré lui » d’un scandale de non-déclaration d’une de ses employées à la CNSS ; l’alors ministre des Droits de l’homme avait eu une réaction particulièrement chaotique faite tantôt d’un silence sépulcral tantôt d’explications compliquées. Puis il avait rasé les murs, jusqu’à s’en aller 15 mois après, et de disparaître des écrans et radars politiques. Mais au-delà de la réaction initiale de Me Ramid, on ne peut qu’admettre sa réaction digne de politique pris en flagrant délit d’entrave au droit du travail.

Nous sommes encore loin de toute pratique honorable des dirigeants politiques, et aussi de bien des gens des médias. Il faut aussi admettre que les réseaux sociaux font souvent dans la surenchère, dans le lynchage public, sans aucune preuve fondée. Alors, à défaut d’une législation dédiée, spécialisée dans les affaires de médias et de réseaux, avec des magistrats formés et rompus aux techniques médiatiques et aux innovations numériques, qui jugent vite, qui jugent bien, évitant les embastillements de jeunes et de moins jeunes qui auraient « liké » un post, fait une remarque désobligeante, politiques et médias resteront séparés, au grand préjudice de la transparence et de la bonne gouvernance.

Que cette justice spécialisée soit créée et agisse, traquant les diffamations et les injures des journalistes et des internautes, mais donnant aussi suite aux accusations étayées par des éléments de preuve ; que cette justice puisse être saisie, qu’elle s’autosaisisse, et alors la confiance s’installera, car ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Aziz Boucetta / panorapost.ma/



Mardi 17 Juin 2025

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