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​Responsabilité médicale au Maroc : Pour quand des lois qui protègent les patients et les médecins ?




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Par Dr Anwar CHERKAOUI Expert en communication médicale et journalisme de santé

Au Maroc, la responsabilité médicale est encore régie par des textes disparates et obsolètes. Et, il n’existe pas de mécanisme clair de médiation ni de loi spécifique qui protège le médecin face aux aléas de sa pratique.
Pourtant, il y a un projet de texte de loi qui dors dans les tiroirs du ministère de la justice depuis 2017. 

Et ce projet de texte de loi a été étudié par des médecins, des juristes, des malades, des parlementaires, par les services concernés du ministère de la santé ainsi que par l’ordre national des médecins. 

En ce fin avril 2025, l’association des gynecologues privés de Rabat viens de relancer le débat sur cette question cruciale de la pratique médicale au Maroc, qu’est la responsabilité médicale.

En attendant, jetons un coup d’œil sur ce qui se passe ailleurs. 

 Qu’en est-il de la responsabilité médicale aux USA, en Allemagne, en France et en Égypte ? 

 La blouse blanche ne protège plus contre les toges noires. 
La responsabilité médicale, autrefois balisée par le secret médical et l’autorité du savoir, est aujourd’hui soumise à la justice, aux médias, et à une société devenue de plus en plus revendicative. 

Des États-Unis à l’Allemagne, de la France à l’Égypte, en passant par le Maroc, les tribunaux sont désormais des arènes où les médecins doivent parfois répondre d'actes commis dans le cadre de leur exercice quotidien. 
Une mutation silencieuse, mais profonde, qui redessine la relation médecin-patient et l’exercice même de la médecine.

 États-Unis : la médecine sous le règne des avocats 

C’est probablement aux États-Unis que la responsabilité médicale est la plus scrutée, la plus redoutée… et la plus monnayée. 
Chaque geste médical peut potentiellement donner lieu à un procès. 
Le malpractice suit, comme on l'appelle, est une industrie à part entière. 
Chaque année, environ 15 000 poursuites sont intentées contre des professionnels de santé. 
Des avocats spécialisés, des compagnies d’assurances agressives, et une culture du dédommagement ont transformé l'erreur médicale en jackpot potentiel pour les plaignants.
De nombreux médecins ont vu leur carrière brisée pour des erreurs de diagnostic ou des négligences post-opératoires. 
La peur du procès induit une "médecine défensive" : examens inutiles, interventions excessives, tout cela pour éviter le tribunal.

 Allemagne : rigueur, transparence… et rareté des peines lourdes 

En Allemagne, la responsabilité médicale est encadrée par un système rigoureux, mais plus équilibré. 
Le médecin n’est pas systématiquement cloué au pilori. 
Les patients peuvent déposer plainte, mais un mécanisme de médiation – souvent via les ordres professionnels – précède les poursuites judiciaires. 
Les procès sont rares, les peines de prison plus encore. 
En 2020, on a recensé environ 2 000 plaintes sérieusement instruites, avec seulement une infime minorité débouchant sur des peines pénales.

 France : entre judiciarisation et quête de réparation 

En France, la loi Kouchner de 2002 a ouvert les portes à la reconnaissance du droit des patients à être indemnisés même sans faute, grâce à la solidarité nationale (ONIAM). 
Cependant, plus de 10 000 plaintes sont enregistrées chaque année pour erreurs médicales, et environ 10 % aboutissent à une condamnation. 
Très peu de médecins écopent de peines de prison, mais les sanctions professionnelles (suspension, interdiction d’exercer) sont de plus en plus fréquentes.

 Égypte : entre condamnations expéditives et manque de garanties pour les médecins 

En Égypte, la situation est dramatique pour les médecins. 
Le pays connaît une judiciarisation brutale, souvent populiste, alimentée par les réseaux sociaux. 
Des médecins sont régulièrement condamnés à des peines de prison ferme, parfois dans des délais rapides, sans véritable expertise indépendante. 
En 2022, la condamnation d’un chirurgien pour "négligence ayant entraîné la mort", avec une peine de 10 ans de prison, a soulevé l'indignation de la communauté médicale Egyptienbe et internationale.
La peur de la prison pousse nombre de jeunes médecins à fuir le pays ou à limiter leur pratique.
L’absence d’un cadre légal clair pour différencier la faute ordinaire de l’erreur involontaire aggrave la situation.

 Et au Maroc ? Un vide juridique abyssal  

Le Maroc n’échappe pas à la tendance mondiale. 
Si les condamnations pénales restent rares, l’insécurité juridique des médecins est réelle. 
La responsabilité médicale est encore régie par des textes disparates et obsolètes. 
Il n’existe pas de mécanisme clair de médiation ni de loi spécifique qui protège le médecin face aux aléas de sa pratique.
Les affaires sont portées directement devant les tribunaux de droit commun, souvent sans avis d’experts indépendants. 
Le procès du chirurgien accusé à tort d’avoir oublié une compresse dans l’abdomen d’une patiente, ou encore celui du gynécologue poursuivi après un accouchement difficile, illustrent ce vide juridique.

Le projet de loi sur la responsabilité médicale, maintes fois annoncé, tarde à voir le jour. 

Pendant ce temps, les praticiens exercent avec la peur de la plainte, de l’amalgame, voire de la vindicte populaire. La médecine devient un champ miné.

 Une profession à risque… dans le silence 

La profession médicale, bien qu’essentielle, devient l’une des plus exposées juridiquement. 
Et pourtant, la plupart des médecins agissent avec conscience, dans des conditions parfois précaires, avec peu de moyens, et une pression énorme. 
À l’heure où le patient devient "client" et où l’exigence de résultats prime sur la compréhension du risque, il est urgent d'encadrer la responsabilité médicale avec rigueur, humanité, et lucidité. 

Pour protéger à la fois le malade… et celui qui le soigne.
La Situation au Maroc est une urgence vitale
Au Maroc, la perche est tendue à l’actuel bureau de l’Ordre National des médecins pour faire ce grand saut qualitatif juridique en faveur de la profession médicale.



Dimanche 4 Mai 2025


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