La région Casablanca-Settat, souvent considérée comme le moteur économique du Maroc, se lance dans une course contre la montre pour répondre aux défis croissants de son territoire. Lors de la session ordinaire du Conseil régional tenue le 7 juillet 2025, une décision audacieuse a été prise : injecter 22 milliards de dirhams supplémentaires dans le Plan de Développement Régional (PDR) 2022-2027. Cet effort porte l’enveloppe globale de ce programme à un impressionnant montant de 130 milliards de dirhams. Mais derrière ces chiffres mirobolants, se cache une réalité désolante où les besoins semblent toujours dépasser les moyens mobilisés.

Le PDR initial prévoyait une participation régionale limitée à 12,7 milliards de dirhams sur un total de 47 milliards mobilisés. Mais face à des besoins criants, notamment dans les zones rurales, la région a revu ses ambitions à la hausse. Selon Abdellatif Maâzouz, président du Conseil régional, « nous avons dépassé le budget initialement prévu par la région, mais les besoins sont plus importants. Le milieu rural, notamment, en est le premier bénéficiaire avec plus de 4,3 milliards de dirhams directement mobilisés. » Ce constat met en lumière les disparités profondes entre les zones urbaines et rurales, où les infrastructures restent insuffisantes malgré les efforts déployés.

Parmi les initiatives les plus marquantes figure le protocole de financement de la ligne à grande vitesse (LGV) Marrakech-Kénitra, un projet colossal estimé à 48 milliards de dirhams. Cette infrastructure, qui vise à connecter les principales régions du pays, repose sur un montage financier complexe impliquant l’État, l’ONCF, trois régions partenaires et plusieurs établissements bancaires. En parallèle, un Réseau Express Régional (RER) autour de Casablanca promet de révolutionner les déplacements locaux, avec une ligne reliant Benslimane à Nouaceur et un pôle d’échange majeur à Casablanca-Sud. Mais la question reste : ces projets bénéficieront-ils réellement à tous les citoyens ou renforceront-ils les inégalités entre les territoires ?

Face à une crise hydrique qui s’intensifie, la région multiplie les initiatives. Un réseau de canalisations pour transporter l’eau dessalée produite à Casablanca et Safi est en cours de développement, avec 17 stations déjà mises en service sur les 28 prévues. Cependant, ces efforts semblent encore insuffisants pour répondre aux besoins croissants des habitants. Par ailleurs, la gestion des déchets connaît des avancées significatives avec la réhabilitation de la décharge sauvage de Médiouna et le traitement des lixiviats. Ces projets, bien qu’encourageants, soulèvent des questions sur leur impact à long terme et leur capacité à répondre aux défis environnementaux.

Dans le domaine de la santé, des projets comme le centre régional de formation aux urgences médicales et le centre de transfusion sanguine à Casablanca visent à améliorer l’accès aux services essentiels. Sur le plan social, des initiatives telles que le programme « Pass Jeunes » et la création de centres socioprofessionnels pour les jeunes en situation de handicap témoignent d’un effort pour rapprocher les citoyens des services publics. Mais ces réalisations, bien que louables, ne suffisent pas à masquer les lacunes persistantes dans l’accès équitable aux infrastructures de base.

Pour financer ces ambitions, le Conseil régional a validé un emprunt obligataire d’un milliard de dirhams, négocié à un taux historiquement bas de 3,92 %. Cette stratégie, bien que audacieuse, pose des questions sur la soutenabilité financière à long terme, surtout dans un contexte économique incertain. En parallèle, des ajustements budgétaires et des reprogrammations de crédits ont été adoptés pour maximiser l’impact des investissements.

La région Casablanca-Settat semble déterminée à transformer son territoire et à répondre aux attentes de ses citoyens. Cependant, les défis restent immenses, et les résultats de ces investissements devront être scrutés de près. Si ces projets promettent de moderniser la région, ils mettent également en lumière les disparités persistantes et les limites d’une gouvernance régionale confrontée à des besoins croissants.