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La reconnaissance d’un État palestinien


La reconnaissance d’un État palestinien est un acte diplomatique fort, avec un contenu et une dimension allant au-delà de sa signification historique et symbolique. Mais tant que la Palestine restera un territoire occupé et fragmenté, sans pressions ni sanctions contre Israël, la reconnaissance même massive d’un État palestinien n’aura que peu d’effets sur les conditions de vie de sa population.



Par Mustapha Sehimi

Que signifie reconnaître un État palestinien? Tant les États-Unis que le Royaume-Uni paraissent ces temps-ci étudier les options de ce projet. Quelles peuvent en être les implications? Alors que c’est la pleine guerre -avec ses 27.000 victimes palestiniennes- à Gaza, l′idée de la reconnaissance officielle de la Palestine en tant qu’État avance; elle est en effet de plus en plus manifeste en Occident.

Voici quelques jours, le site d’information américain Axios avait ainsi révélé que les États-Unis, alliés indéfectibles d’Israël, examinent les options d’une telle reconnaissance à la fin de la guerre. Dans cette même ligne, le ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, a souligné la «responsabilité» de son pays pour faire progresser la fin du conflit israélo- palestinien. Est-ce un tournant que traduisent ces développements?

Reconnaître l′État palestinien? C’est avant tout une décision éminemment politique. Elle n’est pas nécessaire pour nouer des relations bilatérales. Il faut rappeler à cet égard que les États-Unis et d’autres pays occidentaux -la majorité des pays de l’UE et le Canada, ainsi que la Corée du Sud, le Japon, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ne reconnaissent pas l′État de Palestine. Pour autant, ils entretiennent des relations officielles avec l’Autorité palestinienne à Ramallah. Une institution reconnue également par le gouvernement israélien comme représentant légitime du peuple palestinien en vertu des accords d’Oslo en 1993.

La reconnaissance d’un État palestinien est un acte diplomatique fort, avec un contenu et une dimension allant au-delà de sa signification historique et symbolique. Mais peut-elle, et suffit-elle, à porter des solutions justes et équitables sur les frontières, la sécurité, le retour des réfugiés, le statut de Jérusalem, l’accès à l’eau, les relations économiques, etc?

C’est qu’en effet, tant que la Palestine restera un territoire occupé et fragmenté et qu’elle continuera dans cette situation sans s’accompagner de pressions et de sanctions contre les violations commises par Israël -un fait génocidaire-, la reconnaissance même massive d’un État palestinien n’aura pratiquement que bien peu d’effets sur les conditions de vie de la population. Ce constat fait, il est cependant évident que la reconnaissance d’un État palestinien est -et demeure- une étape indispensable pour la pleine consécration de la personnalité internationale et pour un avenir de paix au Moyen-Orient.

Quels sont aujourd’hui les paramètres qui ne permettent pas encore une reconnaissance de l’État palestinien? Pour certains, cela tient au ferme soutien à Israël. Tel est le cas de l’Allemagne, toujours opposée à ce sujet de manière plus marquée que la majorité de ses voisins européens -le legs de la Seconde Guerre mondiale et de la Shoah. Il y a aussi un certain découragement qui s’est installé par suite du peu d’effets qui ont suivi la reconnaissance de la Palestine par certains pays.

L’exemple est celui des sociaux-démocrates en Suède qui ont un temps porté ce projet, alors qu’ils étaient au pouvoir et qu’ils ont constaté qu’aucun mouvement n’avait suivi dans d’autres capitales occidentales. Il y a même un effet inverse aujourd’hui dans ce pays, avec la coalition gouvernementale de droite et d’extrême droite menant une politique nettement pro-israélienne.

 

Alors? Seul un pays comme les États-Unis, indéfectible allié d’Israël, serait en mesure de peser et d’ouvrir la voie à une dynamique plus massive, suivie par des pays européens. Depuis quelques semaines, l’équipe de sécurité nationale du président Biden travaillerait sur un plan pour Gaza.

Le Chef de l’exécutif américain insiste pour sa part sur la recherche d’un «horizon politique», et le secrétaire d’État Antony Blinken multiplie les tournées dans la région dans cette même perspective. Reste la capacité de la Maison-Blanche à faire fléchir le cabinet Netanyahu, toujours opposé à la formule des «Deux États» impliquant un premier prérequis, celui d’un cessez-le-feu.

Un rappel historique permet de mieux appréhender les termes de référence de la reconnaissance de l’État de Palestine. C’est lors des assises du Conseil national palestinien, le 15 novembre 1988, à Alger, qu’est adoptée la Déclaration d’indépendance par Yasser Arafat, alors président du Comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). L’État de Palestine est alors proclamé sur un territoire couvrant la bande de Gaza et la Cisjordanie, avec Jérusalem-Est comme capitale. À ce jour, 139 membres de l’ONU reconnaissent la souveraineté de la Palestine, surtout des pays du Sud et de l’Est.

Depuis 2012, la Palestine est un observateur non membre de l’ONU. Cela ne lui octroie pas le droit de vote à l’Assemblée générale, mais lui donne cependant la possibilité d’adhérer aux agences de l′ONU, comme l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Grâce à ce statut, il vaut de noter encore que la Palestine a été nominée à la Cour pénale internationale (CPI) depuis le 2 janvier 2015, ce qui lui a permis de saisir cette juridiction internationale permanente à différentes reprises à propos de la répression et des exactions d’Israël dans les territoires occupés.

Cela dit, la création d’un État palestinien est l’unique solution qui a d’ailleurs un fondement juridique, et ce, à travers la résolution 181 adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 29 novembre 1947, recommandant le partage de la Palestine entre un État juif et un État arabe, la ville de Jérusalem étant placée sous un régime international de tutelle. C’était là une unique solution avec deux facettes. Pour l’heure, la Palestine est un embryon d’État. Il importe de revoir les règles du droit international relatives aux critères de formation d’un État palestinien et de chercher à transcender les obstacles qui compliquent et retardent l’application effective d’une telle création.

Dans le détail, les obstacles juridiques sont les suivants: l’occupation -sanctionnée par des dizaines de résolution des Nations unies-, l’édification d’un mur entre Israël et les territoires palestiniens, les colonies de peuplement israéliennes dépassant les 800.000 personnes en territoire palestinien occupé, la question de Jérusalem et enfin le droit au retour des réfugiés. Un État palestinien pourrait -et devrait- être créé en droit, mais sa viabilité reste conditionnée par le refus d’Israël. La communauté internationale et les grandes puissances sont aujourd’hui fortement interpellées sur cette question, surtout les États-Unis…


Rédigé par Mustapha Sehimi sur Le 360



Mercredi 7 Février 2024

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