Le Maroc s’apprête à transformer l’Agence Nationale de Gestion Stratégique des Participations de l'Etat (ANGSPE) en société anonyme pour mieux piloter ses participations publiques. Derrière cette mutation juridique se joue une redéfinition du rôle de l’État dans l’économie.
En quelques années, le Maroc est passé du pilotage éclaté et ministériel de ses entreprises publiques à une tentative ambitieuse de centralisation stratégique. La création de l’ANGSPE en 2021 en a été le point de départ. Mais une nouvelle étape se profile : transformer cette agence en holding publique structurée sous forme de société anonyme, à même de porter les participations de l’État, d’en optimiser la valeur, et de renforcer leur contribution à la croissance nationale.
Est-ce là une révolution libérale, une étatisation camouflée, ou un simple retour à une fonction publique plus stratégique ? Décryptage d’une mue en cours, à la croisée des modèles internationaux.
En quelques années, le Maroc est passé du pilotage éclaté et ministériel de ses entreprises publiques à une tentative ambitieuse de centralisation stratégique. La création de l’ANGSPE en 2021 en a été le point de départ. Mais une nouvelle étape se profile : transformer cette agence en holding publique structurée sous forme de société anonyme, à même de porter les participations de l’État, d’en optimiser la valeur, et de renforcer leur contribution à la croissance nationale.
Est-ce là une révolution libérale, une étatisation camouflée, ou un simple retour à une fonction publique plus stratégique ? Décryptage d’une mue en cours, à la croisée des modèles internationaux.
D'une agence technique à un acteur stratégique
La loi n° 82-20 portant création de l’ANGSPE avait pour objectif de créer une entité spécialisée dans la gestion stratégique du portefeuille public. Mais très vite, il est apparu que cette agence devait avoir une personnalité juridique et opérationnelle plus puissante pour intervenir efficacement dans la restructuration des entreprises publiques, entrer au capital, sortir d’actifs non stratégiques, négocier avec des partenaires privés ou internationaux.
La transformation en société anonyme, avec une gouvernance de type holding, répond à cette logique. Le modèle retenu s’inspire largement d’expériences scandinaves ou asiatiques (Singapour, Finlande) où l’État conserve des participations fortes, mais les gère via des structures professionnelles et centralisées.
Une telle holding permettrait à l’État marocain de regrouper ses participations stratégiques, de rationaliser les flux de dividendes, d’agir plus vite sur les marchés de capitaux et de porter les grands projets publics ou mixtes avec davantage d’agilité.
La transformation en société anonyme, avec une gouvernance de type holding, répond à cette logique. Le modèle retenu s’inspire largement d’expériences scandinaves ou asiatiques (Singapour, Finlande) où l’État conserve des participations fortes, mais les gère via des structures professionnelles et centralisées.
Une telle holding permettrait à l’État marocain de regrouper ses participations stratégiques, de rationaliser les flux de dividendes, d’agir plus vite sur les marchés de capitaux et de porter les grands projets publics ou mixtes avec davantage d’agilité.
Une logique de portefeuille dynamique
Ce changement de forme juridique ne relève pas d’un simple toilettage administratif. Il s’agit d’installer une logique de gestion active et rotation du portefeuille : les entités à fort potentiel économique ou stratégique sont consolidées, celles devenues non prioritaires sont cédées, fusionnées ou transformées. La holding devient un véritable investisseur public, avec des exigences de retour sur investissement, de transparence et de performance.
Cette logique suppose aussi une plus grande rigueur dans le suivi des résultats : consolidation des comptes en normes internationales (IFRS), suivi trimestriel de la rentabilité, évaluation des administrateurs, publication annuelle du rapport de l’État actionnaire.
La future société anonyme ANGSPE agira donc à la fois comme gestionnaire de portefeuille, bras financier de l’État, et incubateur d’opérateurs publics compétitifs.
Cette logique suppose aussi une plus grande rigueur dans le suivi des résultats : consolidation des comptes en normes internationales (IFRS), suivi trimestriel de la rentabilité, évaluation des administrateurs, publication annuelle du rapport de l’État actionnaire.
La future société anonyme ANGSPE agira donc à la fois comme gestionnaire de portefeuille, bras financier de l’État, et incubateur d’opérateurs publics compétitifs.
Un outil pour les grands enjeux de souveraineté
Au-delà de la structure, c’est une vision qui s’installe. Le Maroc se dote d’un outil de projection économique au service de ses priorités nationales : sécurité énergétique, transition numérique, mobilité durable, gestion de l’eau, souveraineté sanitaire ou alimentaire.
La holding ANGSPE pourrait devenir le véhicule d’investissement public pour ces chantiers stratégiques. Elle pourrait aussi jouer un rôle de catalyseur pour l’investissement privé, en créant des co-entreprises, en ouvrant son capital à des investisseurs institutionnels ou en finançant des projets conjoints avec des partenaires étrangers.
Dans un contexte géopolitique instable, disposer d’un acteur public fort, capable de défendre les intérêts du Royaume sur des chaînes de valeur critiques, devient un avantage stratégique.
La holding ANGSPE pourrait devenir le véhicule d’investissement public pour ces chantiers stratégiques. Elle pourrait aussi jouer un rôle de catalyseur pour l’investissement privé, en créant des co-entreprises, en ouvrant son capital à des investisseurs institutionnels ou en finançant des projets conjoints avec des partenaires étrangers.
Dans un contexte géopolitique instable, disposer d’un acteur public fort, capable de défendre les intérêts du Royaume sur des chaînes de valeur critiques, devient un avantage stratégique.
Les risques d’un modèle centralisé
Mais cette ambition ne va pas sans risques. Centraliser l’ensemble du pilotage public dans une seule holding exige une gouvernance irréprochable : transparence dans les nominations, évaluation indépendante des résultats, équilibre entre logique politique et logique économique.
Un autre défi concerne l’articulation entre la holding et les ministères de tutelle : si l’État actionnaire devient trop dominant, il pourrait affaiblir la régulation sectorielle ou créer des conflits de rôles. Si, au contraire, la holding n’a pas les moyens d’agir, elle risque de rester une coquille vide.
Enfin, l’autonomie de gestion promise devra être réelle. Transformer l’ANGSPE en société anonyme ne suffira pas si les vieux réflexes d’administration ou d’interventionnisme politique perdurent.
Un autre défi concerne l’articulation entre la holding et les ministères de tutelle : si l’État actionnaire devient trop dominant, il pourrait affaiblir la régulation sectorielle ou créer des conflits de rôles. Si, au contraire, la holding n’a pas les moyens d’agir, elle risque de rester une coquille vide.
Enfin, l’autonomie de gestion promise devra être réelle. Transformer l’ANGSPE en société anonyme ne suffira pas si les vieux réflexes d’administration ou d’interventionnisme politique perdurent.
Une réforme à suivre de près
À travers ce projet, le Maroc se rapproche des pays qui ont professionnalisé leur gestion publique sans renoncer à leur rôle économique. Il ne s’agit ni d’une privatisation déguisée, ni d’un repli étatiste. C’est un recentrage stratégique, dans lequel l’État assume d’être un acteur du marché, tout en orientant les priorités nationales.
Reste à savoir si la transformation en holding publique sera accompagnée de moyens humains à la hauteur, d’une capacité d’arbitrage crédible, et d’un engagement fort en faveur de la performance, de la transparence et de l’innovation.
Reste à savoir si la transformation en holding publique sera accompagnée de moyens humains à la hauteur, d’une capacité d’arbitrage crédible, et d’un engagement fort en faveur de la performance, de la transparence et de l’innovation.