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Éducation des filles au Maroc : défis, opportunités et enjeux socio-économiques


Rédigé par le Vendredi 3 Mai 2024

Parmi les obstacles qui empêchent les filles, surtout dans les zones rurales où l'abandon scolaire est fréquent, de terminer leur scolarité, figure le manque de débouchés professionnels correspondant à leur niveau de formation. Cela ramène à mettre en avant les raisons économiques pour expliquer ces réalités sociales.



La photographie possède le pouvoir de capturer un moment unique et de communiquer de multiples messages de manière plus percutante que les mots les plus habiles. Récemment, j'ai été frappé une fois de plus par cette vérité en regardant une photo prise à la fin du semestre avec une classe de 24 étudiants, sélectionnés parmi 3500 candidats pour former deux classes totalisant 48 élèves. Cette classe représentait un espace où le partage des connaissances et des expériences était valorisé. La photo révèle plusieurs observations significatives : d'abord, le nombre d'étudiantes était de 18 (75%), largement supérieur aux 6 étudiants (25%); ensuite, on remarque une disposition naturelle où les étudiantes ont occupé les places à l'avant autour de l'enseignant, reléguant les étudiants, visiblement résignés et intimidés, à l'arrière; enfin, il émane des visages et des postures des étudiantes un mélange d'aisance et d'assurance, défiant ainsi les injustices de genre persistantes dans notre société. Cette scène intervient au moment où le débat sur la réforme du Code de la famille anime la société marocaine, mettant en lumière des messages de modernisme qui définissent son "charme discret".

Il est maintenant clair que malgré les obstacles, les filles continuent d'exceller dans leurs études de manière générale. En réalité, elles surpassent en nombre les garçons dans l'enseignement supérieur et obtiennent en moyenne de meilleurs résultats au baccalauréat. Les données sont sans équivoque : les filles qui persistent dans leur scolarité réussissent mieux dans leur parcours académique.

Après avoir démontré que la croyance en la "supériorité intellectuelle" de l'homme sur la femme est obsolète et contre-productive, il est urgent de reconsidérer les moyens permettant une meilleure éducation des filles pour éviter le gaspillage.

La question de l'abandon scolaire, en particulier celui des jeunes filles, a suscité un intérêt soutenu de la part des responsables, se traduisant par des mesures et des publications variées. Les obstacles à la scolarisation des filles au Maroc sont multiples : ils peuvent être socio-culturels, liés à la pauvreté, au manque d'infrastructures à proximité, à l'absence de sanitaires, etc. Malgré les efforts des autorités pour améliorer les infrastructures et fournir un soutien financier aux plus démunis, les progrès, surtout en milieu rural, restent insuffisants et soulèvent de nouvelles problématiques, notamment le mariage des mineures. Dans ce contexte, les filles jeunes et sans occupation deviennent souvent candidates au mariage.

Comment convaincre les chefs de famille en milieu rural de retarder le mariage de leur fille qui a cessé ses études, volontairement ou non?

Au-delà des discours émotionnels, il est clair que, dans ce contexte, la fille est souvent perçue comme un fardeau économique et social dès l'adolescence. Trois options s'offrent au chef de famille : marier la fille, l'employer comme travailleuse agricole ou, de manière moins probable, lui permettre de poursuivre ses études avec les frais afférents.

Dans cette réalité, la deuxième option est souvent privilégiée. Les filles qui quittent l'école travaillent dans les champs comme journalières pour contribuer au revenu familial. Même après le mariage, il n'est pas rare qu'une fille divorcée revienne vivre chez ses parents, le divorce n'étant plus un tabou dans de nombreuses régions du Maroc, à condition qu'elle reprenne un emploi. La volonté de la fille détermine généralement si elle reste avec son mari ou retourne vivre chez ses parents.

La troisième option, celle de poursuivre les études, nécessite des arguments solides. L'idée que la fille est aussi intellectuellement capable que le garçon est maintenant acceptée, même en milieu rural. Les perspectives professionnelles réelles à la fin de la scolarité jouent un rôle décisif pour maintenir l'engagement scolaire. Cette démarche repose sur la rationalité économique, reléguant les considérations sociales et religieuses au second plan.

Avec un taux d'activité des femmes de seulement 24% au Maroc, les possibilités d'emploi sont limitées et peuvent compromettre les ambitions scolaires des filles. Les pays ayant réussi à réduire significativement l'abandon scolaire affichent un taux d'activité des femmes atteignant 40%. Dans ce contexte, les femmes poursuivent leurs études dans le but de travailler, sans place pour des choix de carrière superficiels. D'autres facteurs comme l'égalité salariale, les perspectives de carrière et de responsabilité sont également déterminants.

Enfin, de nombreuses questions soulevées dans le projet de réforme du Code de la famille n'auraient pas été aussi débattues si le Maroc avait connu une croissance économique équilibrée et soutenue.

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Salma Labtar
Journaliste sportive et militante féministe, lauréate de l'ISIC En savoir plus sur cet auteur
Vendredi 3 Mai 2024

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