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Entretien : Préparer l’avenir dès aujourd’hui : l’école marocaine à l’épreuve du XXIe siècle


Rédigé par La rédaction le Mardi 24 Juin 2025

Dans un paysage éducatif en pleine recomposition, où les certitudes d’hier vacillent face aux défis d’un monde instable et ultra-connecté, certaines écoles n’attendent plus que la réforme vienne d’en haut. À la tête de la London Academy, Monsieur Benmakhlouf fait partie de ces pionniers qui repensent la formation des jeunes Marocains à l’aune de la transformation globale : mutation des métiers, montée en puissance de l’intelligence artificielle, aspirations nouvelles de la jeunesse. Dans cet entretien exclusif, il revient sur les fondements de son projet éducatif, entre pédagogie active, ouverture internationale et enracinement local. Loin des modèles figés, son approche entend former des élèves capables non seulement de s’adapter, mais aussi d’agir, de créer, et d’inventer leur propre avenir. Une vision ambitieuse, qui pourrait bien inspirer tout le système éducatif marocain.



Entretien avec Monsieur Benmakhlouf CEO de London Academy

1. Monsieur Benmakhlouf, pourquoi estimez-vous essentiel aujourd’hui de "préparer les élèves au monde de demain" plutôt qu’à celui d’hier ? En quoi ce changement de paradigme est-il urgent ?

Monsieur Benmakhlouf  : Dans un monde en perpétuelle mutation, les connaissances acquises aujourd’hui peuvent devenir obsolètes demain. Les métiers évoluent, des industries entières émergent ou disparaissent, et les compétences que nous considérions fondamentales il y a vingt ans ne suffisent plus à garantir un avenir professionnel stable. Préparer les élèves au "monde de demain", c’est anticiper ces mutations, c’est leur donner non seulement des outils techniques, mais aussi une capacité d’adaptation, de créativité, d’analyse critique. À London Academy, cette vision se traduit par une pédagogie active, qui met l’accent sur la technologie, l’esprit entrepreneurial et l’ouverture internationale. Nous voulons former des jeunes qui seront capables de résoudre des problèmes complexes, de travailler en équipe dans des contextes multiculturels et de prendre des initiatives. C’est cette agilité intellectuelle et humaine que nous cherchons à développer. Le monde de demain ne récompensera pas seulement les plus instruits, mais ceux qui savent apprendre, désapprendre, et réapprendre.

2. Vous avez choisi d’adopter le programme britannique. Qu’est-ce qui rend ce système éducatif particulièrement pertinent pour des élèves marocains aujourd’hui ?

Monsieur Benmakhlouf  : Le programme britannique repose sur une philosophie de flexibilité et de rigueur. Il ne se limite pas à transmettre des savoirs académiques ; il développe des compétences transversales, comme la pensée critique, la résolution de problèmes, et surtout l’autonomie intellectuelle. Ce modèle est compatible avec les standards du ministère marocain de l’Éducation, tout en offrant une reconnaissance internationale. Pour les élèves marocains, c’est une formidable passerelle. Ils bénéficient d’une formation bilingue de très haut niveau, sans être coupés de leur environnement culturel local. Nous l’avons aussi enrichi d’un ancrage dans la réalité marocaine et d’options qui préparent aussi bien à des carrières locales qu’internationales. En somme, c’est un programme qui ouvre le champ des possibles, sans imposer un modèle unique. Il répond aux aspirations d’une génération qui veut être à la fois enracinée et ouverte sur le monde.

3. L’usage de la technologie dès le plus jeune âge est au cœur de votre pédagogie. Comment conciliez-vous innovation numérique et sécurité des enfants ?

Monsieur Benmakhlouf  : L’usage des technologies ne doit jamais être subi. Il doit être pensé comme un levier d’apprentissage, pas comme une distraction. Dès l’âge de six ans, nos élèves utilisent des tablettes numériques sécurisées, fournies et gérées par l’école. Ces outils sont strictement encadrés : contenus filtrés, horaires d’utilisation limités, supervision continue. L’objectif n’est pas de remplacer le crayon par l’écran, mais d’initier les enfants à des compétences numériques devenues essentielles : programmation, logique algorithmique, recherche d’information, etc. Nous avons mis en place des modules spécifiques autour de l’intelligence artificielle, de l’Internet des objets, ou encore de la robotique, adaptés à chaque âge. Cette exposition précoce, dans un cadre sécurisé et réfléchi, permet aux élèves de ne pas subir la technologie plus tard, mais d’en devenir des acteurs critiques et responsables. Elle est complétée par une éducation aux médias et à l’éthique numérique, essentielle dans le contexte actuel.

4. Vous introduisez des cours de finance et d’entrepreneuriat dès le collège. Pourquoi cette orientation économique aussi précoce ?

Monsieur Benmakhlouf  : Nous pensons qu’il n’est jamais trop tôt pour éveiller la curiosité économique. Loin d’être un formatage, c’est un moyen d’élargir les horizons des élèves. À travers des cours de business, de finance et d’entrepreneuriat, nous leur faisons découvrir des notions de base comme l’offre et la demande, le rôle de l’investissement, ou encore le fonctionnement d’un budget. Ils apprennent à lire les tendances boursières, à simuler des décisions d’achat d’actions ou à monter un projet fictif d’entreprise. Ce n’est pas seulement une initiation à l’économie, c’est une éducation à la responsabilité, à la prise de décision, à la gestion du risque. Ces compétences leur servent dans tous les domaines. Et surtout, cela leur permet de découvrir ce qui les attire, d’identifier des talents ou des vocations qu’un enseignement classique ne ferait jamais émerger. L’économie, chez nous, devient un vecteur d’estime de soi et de projection dans l’avenir.

5. Les débouchés internationaux semblent être une priorité pour votre établissement. Comment garantissez-vous à vos élèves une reconnaissance académique à l’étranger ?

Monsieur Benmakhlouf  : Tous les examens officiels que passent nos élèves — IGCSE, A-Levels — sont envoyés et corrigés directement en Angleterre. Cela signifie que leurs résultats sont évalués selon les mêmes standards que ceux appliqués dans les meilleures écoles britanniques. Cette rigueur académique nous vaut la reconnaissance de nombreuses universités prestigieuses à travers le monde. Certains de nos anciens élèves ont intégré Oxford, Columbia, ou encore Sheffield. L’un d’entre eux a même obtenu une bourse complète à Columbia University, un exploit qui témoigne de la qualité de notre accompagnement. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec les familles pour les aider à constituer des dossiers solides : lettres de motivation, préparation aux entretiens, orientation ciblée. En parallèle, grâce aux accords entre le Maroc et le Royaume-Uni, nos élèves peuvent aussi intégrer des établissements marocains sans passer d’examens supplémentaires. Cette double possibilité est un vrai atout pour leur avenir.

6. Une part importante de vos diplômés choisit pourtant de rester au Maroc. Que nous dit ce choix sur l’évolution des aspirations de la jeunesse marocaine ?

Monsieur Benmakhlouf  : Effectivement, environ 20 % de nos élèves poursuivent leurs études au Maroc, et ce chiffre est en augmentation. Cela révèle une évolution positive : la jeunesse marocaine ne fuit plus forcément son pays pour réussir. Elle cherche à construire ici, à s’investir localement, à entreprendre. Le fait que notre baccalauréat britannique soit reconnu par les autorités marocaines facilite ce choix. Mais au-delà des aspects administratifs, il y a un changement profond de regard. Nous voyons naître une génération ambitieuse, connectée au monde, mais attachée à ses racines. Ils veulent participer à la transformation du Maroc, à son développement économique et social. Et ce retour de confiance dans le pays est pour nous une excellente nouvelle. Cela nous pousse, en tant qu’école, à continuer à proposer un enseignement international qui reste pertinent localement.

7. Vous mentionnez un partenariat avec l’Université de Huddersfield. Quelle est la logique de cette nouvelle passerelle post-bac, et à qui s’adresse-t-elle ?

Monsieur Benmakhlouf  : Cette passerelle répond à un double constat. D’un côté, de nombreux élèves marocains souhaitent poursuivre leurs études à l’étranger, mais sont confrontés à des barrières financières, culturelles ou logistiques. De l’autre, certaines universités britanniques cherchent à établir des liens plus forts avec des institutions partenaires dans des pays stratégiques comme le Maroc. Le partenariat que nous finalisons avec l’University of Huddersfield permet aux étudiants de suivre deux années préparatoires au sein de London Academy, puis de partir en Angleterre pour une troisième année. Le diplôme final sera exactement le même que celui délivré à un étudiant ayant fait son parcours complet au Royaume-Uni. Cette formule hybride offre une solution plus accessible et moins déracinante. Elle s’adresse aussi bien aux titulaires du baccalauréat britannique qu’à ceux du bac marocain, sous réserve d’un test d’admission. C’est une nouvelle voie, exigeante mais inclusive, vers l’excellence académique.

8. Enfin, comment évaluez-vous l’impact de votre modèle éducatif sur le long terme, aussi bien pour les élèves que pour le système éducatif marocain ?

Monsieur Benmakhlouf  : Nous pensons que l’impact de notre modèle va bien au-delà des résultats scolaires. Former un élève, c’est former un citoyen, un acteur économique, un futur parent, un bâtisseur de société. En cultivant l’autonomie, la créativité, l’éthique et l’ouverture au monde, nous plantons des graines qui porteront leurs fruits dans dix, vingt ou trente ans. Certains de nos anciens élèves sont déjà impliqués dans des projets à impact social, d’autres montent leur start-up ou contribuent à des programmes de recherche. Nous croyons que l’éducation est un levier majeur pour transformer une société — et cela commence dans la salle de classe. Notre ambition n’est pas de former une élite déconnectée, mais une génération consciente, responsable et préparée. Si notre modèle peut inspirer d’autres établissements marocains à innover, à sortir des sentiers battus, alors nous aurons pleinement rempli notre mission.

9. L’intelligence artificielle est aujourd’hui au cœur des grandes transformations mondiales. Quelle place occupe-t-elle concrètement dans votre pédagogie, et comment préparez-vous vos élèves à vivre avec, travailler avec – voire créer avec – l’IA ?

Monsieur Benmakhlouf  : L’intelligence artificielle n’est plus une technologie du futur, elle est déjà un acteur du présent. Elle influence la médecine, la finance, les médias, l’agriculture, et jusqu’à l’éducation elle-même. À London Academy, nous ne nous contentons pas de parler de l’IA comme d’un concept abstrait : nous l’intégrons activement dans les apprentissages dès le primaire, à travers des modules adaptés à chaque niveau. Très tôt, nos élèves découvrent les bases du codage algorithmique, du machine learning simplifié, ou encore de la reconnaissance d’images et de langage. L’objectif n’est pas qu’ils deviennent tous ingénieurs en IA, mais qu’ils comprennent les logiques sous-jacentes, qu’ils puissent adopter un regard critique et qu’ils sachent utiliser ces outils de manière éthique et responsable.

Au collège et au lycée, des projets concrets leur sont proposés : création d’assistants vocaux, analyse prédictive sur des bases de données simples, ou encore simulations d’IA dans des contextes entrepreneuriaux. Nous abordons aussi les enjeux philosophiques, sociaux et économiques de l’intelligence artificielle : les biais algorithmiques, la question de la vie privée, la place de l’humain dans un monde automatisé.

Par ailleurs, l’IA fait aussi partie de notre propre système éducatif. Nous utilisons certaines technologies d’adaptive learning et d’analyse de performance pour personnaliser les parcours de nos élèves. Mais toujours sous contrôle humain, dans une logique de complémentarité, jamais de remplacement. Notre conviction est claire : l’IA ne remplace pas l’intelligence humaine, elle l’amplifie. Et notre mission, c’est de former des jeunes capables de cohabiter intelligemment avec elle, en conservant leur esprit critique, leur créativité et leur humanité.





Mardi 24 Juin 2025

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