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Le gaspillage d’eau potable : talon d’Achille de la stratégie nationale


Rédigé par La rédaction le Jeudi 26 Juin 2025



Des milliards de dirhams investis dans la désalinisation, des barrages gigantesques en construction, des autoroutes de l’eau reliant les régions entre elles… Le Maroc n’a jamais autant misé sur la sécurisation de ses ressources hydriques. Et pourtant, un paradoxe tenace menace cette ambitieuse stratégie de l’intérieur : le gaspillage d’eau potable, souvent ignoré, rarement sanctionné, toujours coûteux. C’est peut-être là le talon d’Achille d’une politique hydrique pourtant audacieuse sur le plan de l’offre.

Le roi Mohammed VI, dans son discours du 29 juillet 2024, n’a pas mâché ses mots. Il a dénoncé l’« insensé » des milliards dépensés dans la mobilisation de l’eau alors que « des formes de gaspillage et mésusage de l’eau persistent ». Cette sortie royale marque un tournant. Pour la première fois, le pouvoir met l’accent non seulement sur les infrastructures à construire, mais aussi sur les comportements à transformer.

Le constat est accablant. Dans plusieurs grandes villes marocaines, jusqu’à 30 % de l’eau potable distribuée se perd dans les réseaux, à cause de fuites, de canalisations vétustes, de connexions illégales. À cela s’ajoutent les comportements individuels : lavage de voitures à grande eau, arrosage excessif, robinets qui coulent, absence de dispositifs économes dans les équipements domestiques. Ces gestes répétés, banalisés, deviennent un gouffre invisible pour une ressource de plus en plus précieuse.

Et la culture du gaspillage ne s’arrête pas aux ménages. Dans certains périmètres agricoles irrigués à partir de réseaux publics, les pertes sont tout aussi alarmantes. Faute de modernisation, une partie de l’eau d’irrigation s’évapore ou s’infiltre avant même d’atteindre les cultures. Les stations de traitement d’eau usée, qui pourraient fournir de l’eau pour l’arrosage ou le nettoyage urbain, restent sous-exploitées. L’économie circulaire de l’eau, encore embryonnaire, peine à convaincre les collectivités locales.

Pourquoi cette inertie face au gaspillage ? La réponse tient en un mot : tarification. L’eau potable reste au Maroc l’un des services publics les moins chers, parfois à peine valorisée au coût de production. Cette politique sociale, justifiée pour les couches vulnérables, devient contre-productive lorsqu’elle s’applique uniformément, y compris aux gros consommateurs. Sans une tarification progressive, incitative, voire punitive en cas d’abus, aucun signal clair n’est envoyé aux usagers.

Pourtant, les solutions sont connues. Des villes comme Barcelone, Singapour ou Cape Town ont adopté des politiques de lutte contre le gaspillage en combinant technologies intelligentes (compteurs connectés, alertes de fuites), campagnes de sensibilisation et tarification verte. Le Maroc dispose des moyens technologiques et des compétences pour faire de même. Il manque peut-être une volonté politique ferme, relayée localement, pour transformer ces idées en actions concrètes.

Car tant que la logique sera : « on va produire plus d’eau pour compenser les pertes », le pays courra après un mirage. Produire coûte plus cher que préserver. L’équation est simple, mais elle nécessite un renversement culturel profond.

Le gaspillage de l’eau n’est pas un détail : c’est un sabotage silencieux de la résilience nationale. À l’heure où chaque mètre cube compte, le Maroc ne pourra pas se permettre longtemps de verser dans l’oubli cette question dérangeante mais essentielle. Investir dans la demande, dans l’éducation à l’usage de l’eau, dans la réparation des réseaux, est aujourd’hui aussi stratégique que construire des barrages ou dessaler l’Atlantique.





Jeudi 26 Juin 2025

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