Un ordinateur composé de neurones humains ? Cela pourrait ressembler à un scénario de science-fiction dystopique, mais c’est désormais une réalité.
 
La start-up australienne Cortical Labs a mis au point le CL1, un bio-ordinateur utilisant des cellules cérébrales cultivées en laboratoire comme unité de traitement.
 
Une avancée révolutionnaire, qui ambitionne de surpasser l’intelligence artificielle traditionnelle tout en consommant moins d’énergie.
 
Disponible pour 35 000 dollars, le CL1 marque une première mondiale. Plus qu’un simple prototype, il est le premier bio-ordinateur commercialisé, un pas de plus vers ce que ses créateurs appellent l’« intelligence biologique synthétique » (SBI).
 
Mais cette innovation soulève des interrogations profondes : où se situe la frontière entre la machine et le vivant ?

Contrairement aux ordinateurs classiques basés sur des processeurs en silicium, le CL1 repose sur des neurones humains issus de cellules souches, cultivés dans un environnement artificiel spécialement conçu pour leur survie.
 
Ces neurones sont déposés sur une plaque recouverte de 59 électrodes, créant un réseau d’interactions entre l’activité électrique biologique et le système informatique.
 
Le dispositif est conçu pour maintenir ces cellules en vie grâce à un environnement mimant les fonctions physiologiques humaines : une circulation de fluides nutritifs imite le rôle du cœur, un système d’évacuation filtre les déchets métaboliques comme des reins, et un mélangeur gazeux régule l’apport en oxygène et dioxyde de carbone.

Cortical Labs ne se contente pas de vendre ces machines révolutionnaires. La start-up propose aussi un service baptisé « Wetware-as-a-Service », qui permet aux clients d’accéder à la puissance de calcul de neurones humains à distance, via un centre de données où ces tissus vivants sont hébergés.
 
Son slogan ? « Déployez votre technologie directement sur des neurones réels. » Une phrase qui interpelle et qui pose une question cruciale : sommes-nous à l’aube d’une nouvelle ère informatique ou au bord d’un gouffre éthique ?

Le CL1 se distingue par sa capacité à apprendre et à s’adapter bien plus rapidement que les systèmes d’IA traditionnels.
 
Une version préliminaire du bio-ordinateur a déjà démontré qu’il pouvait jouer au célèbre jeu Pong, et Cortical Labs affirme qu’il pourrait surpasser les performances des intelligences artificielles numériques.
 
Mais cette affirmation reste difficile à vérifier. Comparer le CL1 aux chatbots comme ChatGPT ou Gemini n’a pas réellement de sens : ces derniers manipulent du texte et des données, tandis que le CL1 reproduit des mécanismes d’apprentissage biologiques.

À partir de quel niveau de complexité un réseau neuronal pourrait-il développer une forme de conscience ou de sensibilité ? Quels encadrements éthiques et légaux seront mis en place pour réguler ces systèmes ?
 
Le Wetware-as-a-Service pose aussi un problème fondamental : considérer du tissu neuronal humain comme une simple ressource informatique ne risque-t-il pas de redéfinir notre rapport au vivant ?
 
Si Cortical Labs voit en son invention une révolution pour la recherche scientifique, la robotique et l’intelligence artificielle, le CL1 nous place face à un choix crucial : jusqu’où sommes-nous prêts à aller dans l’hybridation du biologique et du numérique ?